Roman de Fabrice Lardreau
Patrick Platon Pétrovitch, terne banlieusard, est chef-comptable dans une fédération sportive. Plus comptable que chef, il se découvre un jour un talent certain pour la fermeté. Son assistante, Mme Humbert, accomplit enfin son travail et ses voisins si bruyants mettent la sourdine. C’est le début de l’ère pétrovitchienne ! De cette soudaine poussée d’autorité, Pétrovitch déduit qu’il est un super-héros et qu’il doit protéger Paris. Deux exploits plus tard, le voilà devenu la coqueluche des magazines, de l’entreprise et des voisins. Et il a attiré l’attention de la jolie Sonia, sa collègue du service communication. Mais ce que personne ne sait, c’est que Patrick Platon Pétrovitch traverse l’Atlantique toutes les nuits pour rejoindre l’académie des super-héros à New York. Il appartient à la promotion Spiderman et apprend à maîtriser ses pouvoirs d’homme-araignée. Pas toujours facile de mener une vie secrète…
Le Pétrovitch d’avant Spiderman est un héros du monde ordinaire. Ce n’est même pas un anti-héros : il s’incarne juste parfaitement dans la médiocrité qu’il a choisi. « Je dois l’avouer, j’apprécie la routine. J’y puise un plaisir, une jubilation rassurante et mélancolique. Contrairement aux idées reçues, aux clichés souvent hâtivement répandus, la rigueur est une grande aventure : elle ménage, à l’instar de toute partition, de tout programme musical ambitieux, des micro-variations. » (p. 101) Friant de petits exploits, il jubile à chaque victoire minuscule. Mais endosser le costume d’un super-héros, c’est autrement plus lourd. Si une affiche de cinéma dûment positionnée peut changer une vie, rien ne garantit qu’elle la change pour le meilleur.
Ponctué de nombreuses références à Nicolas Gogol et à sa nouvelle Le Manteau, ce roman dépeint la quête d’un homme : il a trouvé le but de son existence, mais il lui reste à l’accomplir. Mais cet homme mou qui se relève et trouve grâce à ses propres yeux et à ceux des autres peut-il vraiment changer de destin ? « Comme quoi, des fantômes de Gogol aux épaules de Spiderman, de l’Empire russe à la Grosse Pomme, il n’y a qu’un pas. » (p. 31) Comme toutes les ambitions tardives, le rêve de Pétrovitch grossit trop vite et ne peut manquer d’imploser.
Entre humour à la sauce pince-sans-rire et digressions en tout genre, je ne me suis pas ennuyée avec Un certain Pétrovitch. Si vous cherchez un roman rationnel et tranquille, passez votre chemin. Ici il faut s’accrocher à sa cape ! Le loufoque y fait force de loi et côtoie une belle réflexion sur les contingences d’un monde qui manque vraiment de héros.
Du même auteur, lisez Nord absolu.