Dans une forêt du Maine, Arthur Bramhall vient de terminer son roman, son chef d’œuvre. Manque de bol, un ours vole la mallette dans laquelle se trouve le manuscrit et décide de le faire éditer sous son nom, Dan Flakes. Le roman est un succès et l’ours est demandé partout, dans les librairies, sur les plateaux des talkshows, par les publicitaires. « Personne ne vous a jamais dit à quel point vous ressemblez à Hemingway ? / Qui ? / Qui, en effet ! Il se peut fort bien que vous soyez celui qui va le relayer dans l’oubli. » (p. 27) Dans le monde des hommes, le plantigrade est comme un coq en pâte : du miel à volonté, de la nourriture sans avoir à chasser, du chauffage qui permet d’éviter l’hivernation, des femmes disponibles plus d’une fois par an. Mais dans le Maine, Bramhall clame encore et toujours la paternité du roman. Quel avenir pour l’ours ? Le zoo ou les podiums ? « Il abordait les manières de la forêt avec sagesse et celles des hommes avec roublardise. » (p. 15)
Évidemment, ce roman est parfaitement loufoque et propose une satire très cynique sur le monde de l’édition où le livre et l’auteur ne sont que des produits de consommation. Le décalage entre Bramhall qui se demande ce qu’un ours pourrait faire de son roman et la façon dont l’ours est accueilli comme une star est hilarant. « Personne ne sait que je suis un ours. Debout sur mes pattes, les mains dans les poches, je suis juste un type velu parmi d’autres en train de flâner. » (p. 112) L’humour repose très largement sur les quiproquos incessants entre ce que l’ours dit (ou ne dit pas) et ce que les humains veulent entendre et comprendre. Le procédé est efficace, mais employé jusqu’à l’overdose dans ce roman, heureusement assez court et bien conclu. Petit point sur le titre original, The Bear Went Over the Mountain, qui est bien plus percutant que le titre français, pourtant sympathique. L’ours est un écrivain comme les autres est donc un roman plaisant, très divertissant, une vision franche et rafraîchissante sur un univers très fantasmé.