Tokumisa Nzambe po Mose yamoyindo abotami namboka ya Bakoko, dit Moïse, dit Petit Piment, grandit à l’orphelinat de Loango, au Congo. Quand le directeur de l’institution, Dieudonné Ngoulmoumako, fait renvoyer Papa Moupelo, le prêtre qui apprenait des chants et des danses aux enfants, Petit Piment sent que le vent tourne, que tout change. Le directeur ne jure que par la révolution socialiste et la fermeté en matière d’éducation des enfants. « Donner une fessée aux enfants, c’est normal ! Moi-même j’ai été élevé de la sorte, et ça a marché ! On ne va pas en faire tout un plat de port aux bananes plantains ! » (p. 119) Un jour, la coupe est pleine et Petit Piment s’enfuit de l’orphelinat pour rejoindre Pointe-Noire, découvrir la cruauté de la survie et l’injustice du monde. Alors qu’il perd toutes les personnes qui comptent pour lui, il perd aussi la tête. Et quand il la retrouve, c’est pour raconter son histoire, sans espoir de pardon. « Les eaux de la terre ne pourront jamais procurer de la pureté à qui que ce soit. » (p. 178)
Malheur ! La quatrième de couverture est beaucoup trop bavarde ! Oublions cela et approchons-nous de Dieudonné Ngoulmoumako, ce personnage grotesque que Molière n’aurait pas renié dans ses tragicomédies. Despote opportuniste adepte du népotisme, l’homme est odieux, écœurant et ridicule. Il pourrait être un esprit vilain dans un conte de griot. Quant à Petit Piment, il a gagné son nom grâce à ses hauts faits à l’orphelinat : ce justicier raté est touchant, lui qui est témoin et victime des crises qui secouent son pays.
Drôle et lucide, ce roman donne à voir tout un monde de petites gens aux destins moins ordinaires qu’il y paraît. Comme toujours, la voix d’Alain Mabanckou sonne haut et clair : asseyez-vous et écoutez !