Roman de Jules Verne.
Samuel et Sébastien Melvill – frère Sam et frère Sib – sont les tuteurs de leur nièce orpheline, la jeune miss Helena Campbell. Tendrement attachés à la jeune femme, ils sont décidés à lui offrir un mariage convenable. Ils ont choisi un prétendant du nom d’Aristobulus Ursiclos, savant de son état. Les bons oncles ne doutent pas que leur protégée acceptera l’union. Mais Helena est une jeune personne au caractère affirmé. Sans refuser l’offre de ses oncles, elle soumet sa réponse à une condition: elle veut voir le Rayon-Vert, ultime rayon émis par le soleil à son coucher sur une ligne d’horizon de mer dégagée. La vue de ce rayon rare et extraordinaire est réputé pour faire la lumière dans le cœur de ceux qui l’observent. Les oncles, la jeune fille et quelques membres de la maisonnée partent donc pour les côtes maritimes de l’Écosse à la poursuite de ce phénomène optique exceptionnel. Pendant leurs aventures, ils sauvent un jeune peintre, Olivier Sinclair, qui gagnera rapidement le cœur d’Helena. Les contretemps et les aléas météorologiques empêchent pendant plus d’un mois à l’équipée d’assister au spectacle du Rayon-Vert.
Ceux qui me connaissent savent ma passion pour Jules Verne. Après avoir étudié Vingt mille lieues sous les mers en khâgne, je me suis promis de rédiger un jour un étude sur les personnages féminins dans l’œuvre de l’auteur. Le rayon-vert me donne déjà du grain à moudre avec cette histoire d’amour et ce personnage féminin. Helena est une Écossaise pure souche, de noble nature mais au caractère aussi fougueux que ses illustres ancêtres, tel Rob Roy.
Les gravures de L. Benett, présentes dans l’édition originale de l’éditeur Hetzel, grand partenaire et ami de Jules Verne, sont le pendant indispensable du texte. Les mots sont frémir et les images soutiennent l’effroi et l’émotion. Les descriptions des paysages de la belle Calédonie trouvent tout leur éclat dans les gravures.
Aristobulus Ursiclos s’oppose aussi sûrement au personnage d’Olivier Sinclair que l’eau s’oppose à l’huile. « S’il avait été un singe, c’eût été un beau singe – peut-être celui qui manque à l’échelle des Darwinistes pour raccorder l’animalité à l’humanité. » (p 333) Prétentieux et savant au-delà de tout ridicule, Aristobulus rationalise toute chose et s’applique à dénier l’existence de toute poésie. Pour lui, tout possède une explication scientifique. Olivier Sinclair incarne le héros romantique courageux. Empreint de poésie et de sensibilité, il partage la quête d’Helena.
Jules Verne, dans cet autre voyage extraordinaire, excelle une nouvelle fois à vulgariser la science au profit des jeunes esprits. Le baromètre, élément indispensable, devient un personnage particulièrement locace dans le récit. De ses oscillations dépendent les journées de la troupe. Les différents types de nuage sont évoqués, les tempêtes maritimes sont au rendez-vous. Mais ces éléments physiques trouvent une résonance toute littéraire et romanesque. Pas de cours magistral mais des aventures où la nature est partie prenante du dénouement.
La romance est discrète et fait la conclusion de ce roman. Il n’y a pas d’épanchement larmoyant ou passionnés. Helena et Olivier s’aiment, mais discrètement. On sent que l’auteur n’est pas à l’aise avec les affaires de cœur. Sans expédier le dénouement amoureux, il n’en dit pas beaucoup. Moins d’un mois après s’être rencontrés, les tourtereaux s’épousent et s’installent dans le manoir écossais des oncles. L’amour n’est pas un voyage extraordinaire pour Jules Verne, mais une affaire à ranger derrière des murs solides et des volets fermés.
Un grand moment de plaisir pour une lecture très rapide (moins de 1 heure 30…) ! Pas de doute, je ne suis jamais déçue par le grand Jules !