Roman de Stanley Péan. Prix lu dans le cadre du Prix Océans.
Le bizango, qu’est-ce donc ? « 1. En Haïti, membre d’une société secrète dotée du pouvoir de se dévêtir de sa peau humaine et d’adopter toute autre forme de son choix, le plus souvent celle d’un animal volant ou rampant. 2. Victime d’un tel sorcier, condamnée à se métamorphoser en bête carnivore à la tombée de la nuit. » (p. 9)
Dans un quartier de Montréal, une maison de retraite part en fumée. Après le sinistre, une vieille femme affirme avoir été sauvée des flammes par son époux, pourtant décédé depuis plusieurs années. Andréa Belviso, jeune journaliste à la plume efficace, fait de cette déclaration un article qui corrobore les nombreux témoignages déposés sur le net. En effet, le nombre de personnes qui affirment avoir été sauvées ou aidées par un proche disparu ne cesse d’augmenter. Il y a donc un homme caméléon qui se cache derrière toutes ces rencontres étonnantes.
Le même soir, Gemme, superbe prostituée haïtienne, est sauvée des griffes du lieutenant de son mac par un inconnu. Ce mystérieux étranger n’a pas de nom, pas d’odeur et pas de visage. « On aurait dit qu’il n’avait pas de visage à proprement parler. Ou plutôt que ses traits étaient constamment en train de se réarranger. »(p. 49) En outre, l’homme est télépathe et se glisse au plus profond des inconscients des personnes qu’il approche. Gemme et le bizango sont en fuite et tentent d’échapper à Chill-O, caïd qui dirige la pègre haïtienne implantée à Montréal.
Le don du bizango, celui de « pouvoir adopter à volonté une apparence dictée par les désirs et attentes de leurs vis-à-vis » (p. 55), est à la fois une chance et une malédiction. Difficile de dire si le bizango de ce roman est le sorcier ou la victime. Difficile également d’éprouver de la sympathie pour les personnages : j’ai trouvé Gemme trop paumée sous ses airs de sainte et j’estime dommage que l’auteur n’ait pas offert au moins une piste pour comprendre la personnalité du bizango.
Sexe, drogue, violence : ce roman noir est un classique du genre. Hélas, c’est presque un poncif. La touche surnaturelle apportée par les traditions vaudou haïtiennes offre heureusement un peu d’exotisme et d’imprévu. On découvre un peu la communauté haïtiano-québécoise, mais nous voyons surtout le mauvais côté et bon nombre de clichés.
Si j’ai aimé retrouver les idiomes québécois et autres spécialités locales, je me suis rapidement ennuyée en lisant ce polar. Je le sais, ce genre recueille très rarement mes faveurs. Même quand j’en aborde un avec l’esprit ouvert, je suis rapidement agacée et mon intérêt s’émousse. Cela n’a pas manqué avec le roman de Stanley Péan. Dommage pour moi. J’espère que les amateurs du genre apprécieront ce texte.