Roman graphique de Jon McNaught. Prix Révélation du festival d’Angoulême 2013. (Et c’est parfaitement mérité !)
Nous sommes à Dockwood, petite ville américaine parmi d’autres. Et c’est une journée comme les autres. À la maison de retraite Elmview, le commis de cuisine prépare et distribue les repas des pensionnaires. À la sortie du collège, un jeune garçon effectue sa tournée de distribution de journaux avant de rentrer chez lui pour s’asseoir devant un jeu vidéo.
C’est une journée d’automne parfaitement ordinaire et le quotidien routinier des personnages est à peine ébranlé par la mort d’un pensionnaire ou d’un rongeur sur le bord de la route. Dans les arbres, les oiseaux se regroupent avant de s’envoler vers des climats plus chauds. Les rats fouillent les détritus et les écureuils furètent un peu partout.
Il ne se passe vraiment pas grand-chose dans cette histoire, mais elle m’a bouleversée. C’est une œuvre d’une très grande beauté. L’automne est depuis toujours la saison que je préfère aux autres. J’aime aussi l’hiver, mais moins intensément que cette période de transition.
Dès que j’ai pris en main le roman graphique de Jon McNaught, j’ai été séduite par la qualité de la couverture dont le toucher rappelle le tissu. Ont suivi les pages, douces, épaisses, chaudes. Les cases sont très petites et l’histoire tient à la fois de la planche contact et du story-board. Il y a quelque chose de très dynamique dans ces suites d’images presque identiques, mais il faut ouvrir l’œil. Voilà, la souris est sortie du paquet de biscuit et la feuille s’est détachée de la branche. Chaque case capture un instant, une atmosphère. Et, brusquement, voilà qu’éclate une pleine page. L’automne n’est alors plus un puzzle, mais une symphonie. « Les feuilles comment à changer de couleur. […] Les arbres sont vraiment beaux ! »
Ne vous fiez pas à la taille aléatoire des images, c’est moi qui n’ai pas réussi à les mettre à la même dimension.
Il y a très peu de dialogues et très peu de textes de façon générale. Aucune description. Mais les onomatopées sont nombreuses. Et c’est comme si on plongeait dans cette journée et qu’on en percevait chaque seconde. Une chanson brise momentanément le silence, mais l’automne fait déjà son œuvre en appelant au calme. Le minimalisme du texte s’accompagne d’une économie de couleurs parfaitement maîtrisée. Entre orange sépia, bleu glacé, blanc et noir, l’automne est là, alliant la chaleur de ses couleurs à la fraîcheur, voire la froidure de son air.
Jon McNaught propose une œuvre très contemplative, très douce, un rien mélancolique. Il illustre parfaitement ma vision de l’automne, entre feuilles mouillées, flaques lumineuses et rayons de soleil dans l’air frais. L’arrière-saison est cet entre-deux serein entre deux saisons plus rigoureuses, cette parenthèse suspendue entre l’hystérie des plages et l’effervescence des guirlandes lumineuses. Je le répète : cette œuvre m’a bouleversée. Je vais la garder à portée de main dès que l’automne se fera trop lointain et que l’été écrasera tout de sa chaleur indélicate.