Andrew Chase-White est un Irlandais engagé dans l’armée britannique. Au printemps 1916, il profite d’une permission dans sa famille avant de retourner combattre en France. Peut-être en profitera-t-il pour faire enfin sa demande à la belle Frances Bellman, qu’il connaît depuis toujours et avec laquelle il est plus ou moins engagé. Mais il repousse sans cesse le moment tout en se préparant à le provoquer. « La peur le poussait à s’approcher le plus possible de l’objet de ses terreurs. » (p.13)
Pendant ce temps, Millicent, sa très belle tante, est courtisée par Christopher Bellman, le père de Frances. Cette femme libre et très sensuelle cèdera-t-elle à la demande insistante de ce veuf très épris ? Rien n’est moins sûr : Millie est de ces femmes dont la sensualité a besoin d’être nourrie et elle est prête à se donner à tous les hommes de la famille, incapable de résister à une passion.
Il y a Pat et Cathal, deux frères très unis. Mais Pat s’éloigne, exalté par la perspective d’une guerre prochaine entre l’Irlande et l’Angleterre. « C’est ainsi que pour Pat l’idée d’un soulèvement armé, brusquement imminent, était devenue le but même de l’existence. » (p. 109) La révolte irlandaise gronde depuis quelque temps et le combat semble inévitable. Pour Pat, c’est l’occasion de se réaliser, enfin, et de s’opposer à son cousin Andrew et à son uniforme anglais. « L’Irlande qu’il aimait n’était ni personnifiée, ni décrite, c’était la contrepartie purifiée, affinée de sa propre qualité d’Irlandais, le pôle magnétique indispensable au ressentiment d’une servitude qu’il voyait autour de lui et, plus que partout, en lui. Pour cela, il se battrait et son combat serait nécessairement sanglant. » (p. 109)
Entre Rameaux et Pâques, les drames personnels se nouent et la guerre se prépare. Certains n’y croient pas et refusent d’envisager un conflit : l’Irlande et l’Angleterre sont deux pays civilisés qui ont su dépasser leurs différends. « Il se peut qu’il y ait eu quelques évènements déplorables autrefois, mais tout cela est du passé, je suis certaine que l’Angleterre n’a jamais fait souffrir volontairement ; ce n’était rien d’autre qu’un phénomène économique. » (p. 47) Ce point de vue n’est hélas pas partagé par tous, surtout pas par la jeunesse.
La guerre civile irlandaise est un sujet qui m’intéresse depuis longtemps. Hélas, je me suis ennuyée avec ce roman pourtant parfaitement écrit. La mise en route est longue, trop longue. Certes, cela permet à l’auteure de définir très précisément ses personnages et de présenter les tréfonds de leurs âmes tourmentées. Mais voilà, à mon sens, il n’y a que ça dans ce roman, des personnages. Ils sont complexes, ils sont émouvants, ils sont puissants, mais ils font si peu ! Et le peu qu’ils font est tellement précipité ! Dès le titre, on s’attend à des affrontements. Ils seront de deux titres, familiaux et nationaux, les premiers prenant largement le pas sur les seconds. En témoigne le dernier chapitre qui raconte en quelques pages le déroulement et la conclusion des combats que l’on attendus pendant 370 pages. Mais peut-être était-ce la volonté de l’auteure de ne pas écrire un énième roman sur la guerre civile. Ou plutôt, il semble qu’elle a voulu incarner le conflit national dans un conflit intime, montrant ainsi l’Irlande comme une grande famille tiraillée et déchirée.
Iris Murdoch a une plume saisissante et un talent certain pour créer des personnages. Il faudra que je lise d’autres romans d’elles pour ne pas passer à côté de ce que je sens être une grande auteure !