Dévastée par le décès de sa mère, l’échec de son mariage et une addiction grandissante à la drogue, Cheryl Strayed a un matin décidé d’entreprendre seule la longue randonnée du Pacific Crest Trail, ou PCT. « Je pourrais enfin laisser mes problèmes derrière moi. En réalité, j’allais seulement m’en créer de nouveaux. » (p. 42) Pendant plusieurs mois et plus de 1700 kilomètres, elle avance pour prendre un nouveau départ et, pour se confronter à elle-même, physiquement et intimement. Elle randonne parfois avec d’autres marcheurs, mais la plupart du temps, elle est seule avec Monster, son sac de randonnée qui contient toutes ses possessions. « Avant de parcourir le monde à pied, je n’avais jamais pris conscience qu’il était si vaste – que même un kilomètre était vaste. » (p. 127) D’étape en étape, pas après pas, elle allège son chargement, sa tête et son cœur. Au bout du PCT, Cheryl sait qu’elle sera devenue quelqu’un d’autre, qu’elle aura grandi et qu’elle sera en mesure d’affronter l’existence. « Je ne me trouvais plus complètement nulle. Et je n’étais pas non plus une putain de guerrière amazone. Je me sentais simplement féroce, humble et concentrée sur moi-même, en sécurité dans ce monde. » (p. 252)
L’autrice commence son récit par la perte de ses souliers. Ça donne immédiatement le ton : il n’est pas question d’une sympathique randonnée d’une demi-journée, mais bien d’un total dépassement de soi, d’un renoncement complet. « Il s’avérait que cela n’avait pas grand rapport avec la marche. En fait, ça avait nettement plus de rapport avec l’enfer qu’avec la marche à pied. » (p. 55) Je comprends tout à fait que ce témoignage ait inspiré tant de personnes à tenter l’expérience du PCT. Moi-même, je me dis souvent que je devrais souvent tout lâcher pour faire le chemin de Compostelle : moins physique certes, mais pas moins éprouvant pour l’âme. La communion avec la nature, le retour à l’essentiel, c’est plus qu’un fantasme : ça semble devenir une nécessité. « J’étais un caillou. Une feuille. La branche pointue d’un arbre. Je n’étais rien pour eux ; ils étaient tout pour moi. » (p. 92)
Je n’ai pas vu le film, mais je tenterai à l’occasion.