En ouvrant son texte sur Saint François d’Assise, le Pape s’inscrit dans une tradition catholique faite d’amour pour l’intégralité du vivant. Sans être antispéciste ni remettre en cause le principe selon lequel l’homme est le fleuron de la Création divine, François rappelle que par sa position privilégiée, ledit homme a la responsabilité de protéger les autres créatures : sa domination n’est pas absolue, mais relative.
François cite la Bible, d’autres papes, des évêques et des responsables d’autres religions. Son discours est certes religieux, mais il est surtout catholique au sens premier du terme, c’est-à-dire universel. Oubliez qu’il s’agit du chef de l’Église romaine et pensez en termes éthiques et moraux. Si vous retirez les mots associés à la foi, vous obtenez un texte parfaitement compréhensible par tous, sans considération de religion. Encore faut-il être ouvert à ce discours apaisé, mais qui enjoint à agir et réagir. Bien moins virulent que Greta Thunberg (dont je partage les positions et le ton), François développe une pensée claire fondée sur des arguments évidents sans être d’autorité.
Il propose un dialogue entre la religion, la science et le bon sens autour d’un même sujet afin de créer une écologie intégrale, humaine, sociale et économique, fondée notamment sur une éducation environnementale généralisée et une aspiration à la sobriété heureuse. Le Pape soumet des propositions qui coulent de source et qui ne devraient pas faire débat.
- Lutter contre la culture du déchet,
- Protéger les migrants climatiques, les pauvres et tous les exclus,
- Développer les énergies renouvelables,
- Assurer l’accès à l’eau en évitant la privatisation des réserves,
- Préserver la biodiversité,
- Encourager les états à agir sans tout céder au capitalisme local et international,
- Ne pas se réfugier derrière les promesses technologiques.
Je vous laisse avec de nombreux extraits de cette encyclique fondamentale pour l’avenir de l’humain et de la terre.
« Cette sœur [la terre] crie en raison des dégâts que nous lui causons par l’utilisation irresponsable et par l’abus des biens que Dieu a déposés en elle. Nous avons grandi en pensant que nous étions ses propriétaires et ses dominateurs, autorisés à l’exploiter. » (p. 9)
« Passer de la consommation au sacrifice, de l’avidité à la générosité, du gaspillage à la capacité de partager. » (p. 14)
« Si nous nous sentons intimement unis à tout ce qui existe, la sobriété et le souci de protection jailliront spontanément. » (p. 16 & 17)
« Le changement est quelque chose de désirable, mais il devient préoccupant quand il en vient à détériorer le monde et la qualité de vie d’une grande partie de l’humanité. » (p. 22)
« À cause de nous, des milliers d’espèces ne rendront plus gloire à Dieu par leur existence et ne pourront plus nous communiquer leur propre message. Nous n’en avons pas le droit. » (p. 33)
« Pourquoi veut-on préserver aujourd’hui un pouvoir qui laissera dans l’histoire le souvenir de son incapacité à intervenir quand il était urgent et nécessaire de le faire ? » (p. 50)
« Tout l’univers matériel est un langage de l’amour de Dieu, de sa tendresse démesurée envers nous. Le sol, l’eau, les montagnes, tout est caresse de Dieu. » (p. 71)
« L’environnement est un bien collectif, patrimoine de toute l’humanité, sous la responsabilité de tous. Celui qui s’approprie quelque chose, c’est seulement pour l’administrer pour le bien de tous. Si nous ne le faisons pas, nous chargeons notre conscience du poids de nier l’existence des autres. » (p. 79)
« La vie est en train d’être abandonnée aux circonstances conditionnées par la technique, comprise comme le principal moyen d’interpréter l’existence. » (p. 91)
« Cesser d’investir dans les personnes pour obtenir plus de profit immédiat est une très mauvaise affaire pour la société. » (p. 103)
« La technique séparée de l’éthique sera difficilement capable d’autolimiter son propre pouvoir. » (p. 109)
« On ne peut plus parler de développement durable sans une solidarité intergénérationnelle. » (p. 126)
« Si les citoyens ne contrôlent pas le pouvoir politique – national, régional et municipal – un contrôle des dommages sur l’environnement n’est pas possible non plus. » (p. 142)
« Si une personne a l’habitude de se couvrir un peu au lieu d’allumer le chauffage, alors que sa situation économique lui permettrait de consommer et de dépenser plus, cela suppose qu’elle a intégré des convictions et des sentiments favorables à la préservation de l’environnement. » (p. 165)
« Le bonheur requiert de savoir limiter certains besoins qui nous abrutissent, en nous rendant ainsi disponibles aux multiples possibilités qu’offre la vie. » (p. 173)