Roman d’Antoine Bello.
Sliv Dartunghuver croyait être embauché par un cabinet d’études environnementales. Il a en réalité intégré le CFR, une organisation qui falsifie le réel, le passé et les archives. « Quand tous les éléments d’une organisation comme le CFR travaillent dans la même direction, on peut vraiment changer le monde, plus qu’aucun d’entre vous isolément ne pourrait le faire ou même en rêver. » (p. 104) Quel est le but de cette entité ? Qui décide du Plan qu’elle applique scrupuleusement ? « On peut tout aussi bien imaginer que le CFR est une sorte de bras armé pour les multinationales ou qu’il cherche à prendre le contrôle politique du monde occidental. » (p. 109 & 110) À quoi servent les scénarios que les falsificateurs produisent, dans lesquels l’efficacité est toujours mesurée à l’aune du risque engagé ? « Si tu as pu écrire ce scénario, c’est que tu comprends comment fonctionne le monde. Tu as repéré une injustice et tu as pensé que tu pouvais la corriger. » (p. 111) Et que se passe-t-il quand le risque l’emporte et compromet la sécurité du programme ? « Il suffit de réfléchir cinq minutes pour comprendre qu’une organisation comme le CFR connaît forcément des ratés. Il faut être bigrement niais pour imaginer qu’ils se résolvent tous seuls. » (p. 247) De Reykjavik à Krasnoïarsk en passant par Cordoba, Sliv balance entre enthousiasme et scrupule devant l’ampleur du travail que l’on attend de lui et face au grand mystère qui entoure l’organisation qui l’emploie.
Vous êtes convaincu que l’assassinat de Kennedy dissimule un grand secret ? Ou que personne n’a vraiment marché sur la Lune ? Et si vous aviez raison ? Et si les théories du complot étaient avérées ? En lisant le roman d’Antoine Bello, on se dit qu’être paranoïaque a du bon. « Je défie quiconque est passé par le CFR de pouvoir lire un journal sans chercher aussitôt les symptômes de la falsification. » (p. 274 & 275) Avec le premier tome de sa trilogie, l’auteur met en place un ambitieux polar historico-géopolitique. J’ai un peu tiqué sur le style parfois pauvre ou lourd, mais le roman se lit avec avidité. Et la fin des plus frustrantes donne furieusement envie d’attaquer la suite des aventures de Sliv Dartunghuver pour comprendre enfin la finalité du CFR. « Noyez vos lecteurs dans les détails qui leur feront oublier que vous leur cachez l’essentiel. » (p. 196)