Les Fleury-Nadal – Série intégrale

Attention, révélations possibles dans cet article qui présente une série BD entière !!!

Cette série se lit en parallèle du Décalogue et en présente la famille centrale.

Tome 1 : Ninon – Bande dessinée de Frank Giroud et Lucien Rollin.

Chez les Fleury-Nadal, en 1797, Hector est un écrivain qui commence à rencontrer un certain succès et Eugène est auréolé de ses exploits en tant que capitaine de l’armée napoléonienne. Le premier hait le second et voudrait que leur jeune sœur, la très belle Ninon, l’admire autant que le militaire flamboyant. « Oh, frérot ! Frérot ! Comme je te déteste et comme je t’envie ! » (p. 55) Quand leur père, naturaliste passionné, est soupçonné d’affinités royalistes et emprisonné, Ninon fait tout pour le faire libérer. Et Hector, pour gagner sa reconnaissance, fait jouer ses relations. Mais sa jalousie envers Eugène obscurcit son jugement et les conséquences seront terribles, surtout dans une époque où la guillotine est prompte à endeuiller les familles.

Qu’il est bon d’avoir davantage de contexte pour comprendre la relation malsaine présentée dans Le Décalogue entre Hector et Eugène, quand ce dernier revenu traumatisé d’Égypte, est à la merci de son aîné. Nous rencontrons les jeunes sœurs de la famille, avec une Ninon aussi entêtée que fougueuse. Et beaucoup de choses se nouent alors que les Fleury-Nadal commencent à être décimés.

Tome 2 : Benjamin 1/2 – Bande dessinée de Frank Giroud et Daniel Hulet.

Sur les barricades parisiennes de 1830, le jeune Benjamin Fleury, élève à Polytechnique, défend la liberté. Fasciné par les théories saint-simonistes du père Enfantin, il adhère au projet de créer un canal entre la Mer Rouge et la Méditerranée. C’est en Égypte qu’il entreprend de donner vie à ce dessein monumental. Sur place, il retrouve une histoire qui a bercé son enfance. « C’est avec un émerveillement indicible que j’ai retrouvé les ambiances décrites dans Nahik et les scènes peintes par Desnouettes ! » (p. 21) Mais ce qui fascine surtout Benjamin, c’est le vieux portrait d’une jeune espagnole de toute beauté et celle qui semble être l’incarnation exacte et vivante du tableau.

Le Décalogue avait été avare de détails sur l’arrivée et la vie de Benjamin au pays des pharaons. Son obsession pour ce pays est désormais plus claire. Et la série consacrée aux Fleury-Nadal complète avantageusement la série-mère. Elle donne également envie de la relire !

Tome 3 : Benjamin 2/2 – Bande dessinée de Frank Giroud et Daniel Hulet.

Benjamin Fleury est parti à la recherche d’Aurore Beauchamp, sur les traces du pharaon Nepher et de son épouse. Ce couple oublié de monarques égyptiens a tenté de prôner une société pacifique où chaque être aurait renoué avec le divin. Comme une lointaine préfiguration du Décalogue écrit sur une omoplate de chameau… « Votre fascination pour Nahik, la rencontre avec le comte sur les barricades, le portrait de ma mère, votre décision de venir en Égypte, croyez-vous vraiment qu’il s’agisse d’une suite de hasards ? » (p. 50) Benjamin s’aventure dans un temple perdu. Il est prêt à tout pour sauver la femme qu’il aime.

Voilà un épisode un peu inférieur aux précédents. Il étoffe certes le personnage de Benjamin, mais ne dit pas grand-chose de plus de son histoire. Il referme un peu brutalement les péripéties égyptiennes de la famille Fleury et me laisse sur ma faim.

Tome 4 : Anahide – Bande dessinée de Frank Giroud et Didier Courtois.

Anahide est la sœur de Missak, protagoniste du tome 5 du Décalogue. En 1915, pendant la déportation des Arméniens par les Turcs, elle est enlevée par des Kurdes et réduite en quasi-esclavage. Après un bond jusqu’en 1987, on rencontre une jeune femme allemande d’origine turque. Elle accompagne sa grand-mère dans un voyage sur les traces de son passé. Et elle ne décolère pas face au refus de l’Europe d’accepter la Turquie parmi ses membres. « Quand on ne nous jette pas au nez la montée de l’intégrisme, on nous ressort le problème kurde ou le mythe du génocide ! » (p. 27) Or, il y a dans l’histoire européenne une part de l’histoire personnelle de cette Allemande. Quand les secrets de famille sont révélés, il y a des injustices à réparer.

Ce volume s’éloigne vraiment du Décalogue et donne à l’histoire générale une dimension internationale. C’est intéressant et l’histoire d’Anahide est vraiment bouleversante, mais cet album me donne le sentiment d’un certain remplissage. Ne rien savoir des proches de Missak après qu’il a échappé aux Turcs, c’est fondamental pour comprendre son histoire et ses choix.

Tome 5 : Missak 1/2 – Bande dessinée de Frank Giroud et Gilles Mezzomo.

Après une longue errance en Europe et des souffrances innombrables, Missak est à Ellis Island, prêt à se construire une nouvelle vie loin de l’Arménie et des Turcs. Étant mineur, il est confié à ses grands-parents qui tiennent un commerce florissant. Mais Missak ne peut pas raconter ses traumatismes ni ce qu’il a dû faire pour survivre. L’amour et la bonne volonté de ses proches ne suffisent pas à l’intégrer dans ce nouveau monde ou à effacer sa culpabilité. De mauvaises fréquentations en décisions douteuses, son avenir en Amérique semble compromis. « J’ai pas fui des brutes sanguinaires jusqu’au bout du monde pour me faire emmerder par des petits cons dans ton genre ! Par des branleurs qui n’ont jamais posé leurs godillots au-delà du Bronx ! » (p. 30)

Ku Klux Klan, prohibition et pègre new-yorkaise, voilà ce qui attend le jeune Missak à sa descente du bateau. Ce sont d’autres formes de violence pour cet adolescent perdu qui a oublié ce que sont la douceur et la bonté. Avec Nahik dans ses bagages, livre qu’il a protégé de tout, il garde vivace la mémoire des siens. Et ce volume m’a bien plus séduite que les deux précédents, car il prépare l’épisode 5 du Décalogue.

Tome 6 : Missak 2/2 – Bande dessinée de Frank Giroud et Gilles Mezzomo.

Rejeté par sa famille, Missak vit dans la rue et craint que Collins, agent de l’immigration qui a une dent contre lui, ne le rattrape et ne le renvoie en Europe. Il s’acoquine avec des personnes peu recommandables et est prêt à tout pour oublier l’Arménie et ses souffrances. « Tu n’as pas idée de ce que j’ai dû faire pour survivre ! Jamais je ne pourrais devenir quelqu’un de bien, grand-père… Parce que là d’où je viens, le bien n’existait plus ! » (p. 26) Hélas, fuir le passé devient de plus en plus difficile, et quand les erreurs les plus récentes ajoutent leurs casseroles, Missak comprend qu’il doit revenir sur ses pas et aider l’Arménie et les siens à obtenir justice.

Avec ce volume qui clôt la série consacrée aux Fleury-Nadal, Frank Giroud reboucle sur Le Décalogue, après avoir comblé certains blancs et élucidé des mystères. Il est dommage que la qualité ne soit pas au rendez-vous de tous les albums, mais les deux derniers sont excellents.

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