Ferenc, juif hongrois, a quitté l’Europe après des investissements ratés. Avec femme et enfant, il a choisi le Brésil pour recommencer sa vie. Cultivé et convaincu que l’éducation ouvre toutes les portes, il inscrit sa fille Rachel au collège tenu par des religieuses, catholiques évidemment. Dès lors, l’enfant doit composer entre son héritage juif et la fascination qu’exerce sur elle ce christianisme jusqu’à alors inconnu. Terrifiée par la damnation promise au peuple élu dans le Nouveau Testament, Rachel se bricole une religion qui la sauvera, entre croix rédemptrice et dieux païens.
Le roman est construit autour d’une journée de Rachel, alors âgée de 37 ans. Le lecteur la suit dans la canicule alors que ses souvenirs se bousculent et dressent son portrait. Le narrateur est JE. C’est un dieu. C’est Dieu, quel que soit le nom qu’on lui donne. « JE l’ai dit. JE suis celui qui compte les heures et les jours. JE suis celui qui décide du temps imparti à chacun. » (p. 105) Il sait tout de l’histoire de cette femme un peu perdue, coupable de tant de trahisons anodines et pourtant tellement pardonnable, qui cherche surtout comment vivre en repoussant l’inéluctabilité de la mort.
J’ai ressenti beaucoup de sympathie pour Rachel. Sans doute parce que j’approche de son âge et que certaines de ses questions sont les miennes. Mais surtout parce que cette môme têtue à l’imagination fertile et à la volonté affirmée est l’enfant que j’aurais aimé être.
De Moacyr Scliar, je vous conseille également Max et les fauves.