Pourquoi n’y a-t-il pas eu de grands artistes femmes ?

Essai de Linda Nochlin.

Le titre pose une question provocatrice, faussement simple, voire faussement simpliste. Ce n’est pas les femmes et la grandeur qu’il faut interroger, mais tout un système sur plusieurs siècles et en intégrant des éléments sociaux très divers. « La féminité ne saurait rassembler en un coup d’œil le style des femmes artistes en général, pas plus qu’elle ne saurait rassembler ceux des écrivaines. » (p. 27) L’autrice met en garde contre le biais du mâle blanc et contre les idées reçues sur l’art, le génie ou le talent. La réflexion doit par exemple intégrer le fait que les femmes n’avaient pas le droit de peindre des nus, et ce pendant des siècles, ce qui les a empêchées de perfectionner leur art selon les canons dits classiques.

Évidemment qu’il y a eu de grands artistes femmes ! Il suffit de réfléchir 30 secondes pour trouver des noms. Toutefois, il faut comprendre ce que ces femmes ont dû abandonner ou comment elles ont dû composer avec les attentes de leur époque pour gagner leur place. « Il en va de la littérature comme de la vie, et même lorsqu’une femme s’engage pleinement dans une carrière artistique, on attend d’elle qu’elle abandonne tout au nom de l’amour et du mariage. » (p. 63) À croire qu’une femme, quel que soit son domaine, ne peut jamais réussir sans sacrifier de prétendues valeurs éminemment féminines.

Linda Nochlin a publié cet essai en 1971. En 2006, elle y a ajouté quelques pages en intégrant les progrès de la recherche et le développement des mouvements féministes au cours des trois décennies passées. « L’histoire de l’art féministe est là pour semer la zizanie, pour remettre en question, pour voler dans les plumes du patriarcat. Elle ne devrait pas être prise pour une variante ou un simple supplément de l’histoire de l’art mainstream. Dans sa pleine acception, l’histoire de l’art féministe est une pratique transgressive et contestataire destinée à remettre en cause une grande partie des préceptes majeurs de la discipline. » (p. 104) Une fois encore, l’autrice rappelle que les réussites artistiques féminines existent. Il faut continuer, inlassablement, à les porter et à les montrer, mais sans s’en contenter. Les femmes doivent continuer à créer et toutes, artistes ou non, poursuivre la lutte.

Cet essai court et clair prend évidemment place sur mon étagère de lectures féministes, et je sais déjà que j’y reviendrai souvent !

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