Mon autre

Roman d’Herbjörg Wassmo.

« Ces deux-là, Rut et Gorm, n’ont cessé de se croiser par hasard depuis l’enfance, sans faire connaissance. » (p. 9) Mais enfin, leurs chemins se superposent dans les années 1980. Lui continue de diriger l’entreprise familiale dans le nord de la Norvège, elle poursuit sa carrière de peintre entre Oslo et le reste du monde. Elle comme lui arrive dans cette relation longtemps rêvée avec des casseroles, des doutes et des insécurités. Les débuts de la relation se font à distance, mais cela n’empêche pas les promesses. « Dans son inconscience, il lui avait affirmé qu’il serait toujours à côté quand elle aurait besoin de lui, où qu’elle se trouve dans le monde. » (p. 49) Rut repousse sans cesse les limites de son art, le nourrissant de son amour pour Gorm, parfois jusqu’à le prendre pour modèle. Gorm se révèle et s’épanouit en reprenant des études, mais surtout en s’investissant entièrement dans sa relation amoureuse. « Elle est l’Autre de sa vie. Non pas celle qui doit lui appartenir. Celle qu’il doit aimer. » (p. 52) Jusqu’au début des années 2020, ces deux êtres bâtissent une passion quotidienne, fondée sur la patience : les écarts sont toujours tristes, mais la confiance et solide.

Avec ce nouveau roman, Herbjörg Wassmo parle d’une femme qui a définitivement lâché prise, d’une autre qui se libère de la tyrannie mâle et d’un homme qui ose décevoir les attentes qui pesaient sur lui. Il est question de parents distants, de parents de substitution, de parents qui font de leur mieux… Au gré d’ellipses parfois vertigineuses, entre la Norvège septentrionale et les grandes capitales mondiales, l’autrice emmène ses protagonistes sur le long chemin de l’amour dont les embûches imposent sans cesse de réinventer l’affection que l’on porte à l’autre. « Tu es celle que j’aime sur cette terre et même un peu plus loin, que j’aime. Je pèse le mot. » (p. 151) Ce roman est loin d’être aussi flamboyant que la saga de Dina, mais j’ai aimé son caractère plus apaisé.

J’en retiens enfin quelques mots férocement justes sur la dépression et les efforts qu’elle demande pour garder sa place dans le monde. « J’espère au moins que j’en aurai appris quelque chose. Sur le désespoir et la honte, sur la solitude et l’incapacité à agir. Sur le fait que le visage qu’on montre aux autres, jour après jour, ne correspond pas toujours à ce qu’on ressent. » (p. 115)

Ce contenu a été publié dans Mon Alexandrie. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.