Roman graphique de Clara Lodewick.
Merel vit seule dans une petite maison au bout du village. Elle élève des canards et écrit des articles pour le journal local. Elle est indépendante, décontractée et sympa avec tout le monde. Mais il suffit d’une blague et des soupçons d’une épouse en colère pour que tout change. La rumeur mauvaise enfle dans le bourg, des qualificatifs injurieux circulent et certains indélicats essaient d’en profiter. « Ma mère dit que les gens parlent mal d’elle par jalousie. » Merel n’est plus la bonne copine, celle avec qui on boit un verre après le match. Elle est la mauvaise femme, la dévergondée, la briseuse de couple. Quand les enfants et les adolescents se mêlent au harcèlement sournois, à coup de paris stupides, ce sont d’autres drames qui se nouent.
Avec intelligence, l’autrice nous parle du regard négatif encore posé sur les femmes seules, sexuellement libres et qui vivent en se moquant du qu’en-dira-t-on. Le vilain nom de sorcière n’est pas loin et il en faudrait peu pour qu’un lynchage s’organise. Quand la camaraderie devient suspecte et que les hommes sont blessés dans leur orgueil, ce sont toujours les femmes qui trinquent. Clara Lodewick parle aussi de pardon, celui qu’il faut savoir demander. Le jeune Finn est un personnage bouleversant, pris dans les disputes de ses parents et dans des querelles d’adultes qui le disputent.
Merel est une protagoniste forte, mais pas invincible. Sa générosité et son cœur simple achoppent sur la bêtise collective. À travers elle, ce sont toutes les femmes qui sont visées, et surtout celles qui ne rentrent pas dans le rang, les mauvaises mères, les infidèles, etc. Ce très bel ouvrage prend immédiatement sa place sur mon étagère féministe, mais il va aussi passer dans les mains de plusieurs amies. Ce n’est pas à nous, les femmes seules et autonomes, de demander pardon.