Faut-il vraiment présenter Mafalda, petite fille très éveillée ? Elle aime les Beatles et la Panthère rose, mais elle est bien préoccupée par la menace nucléaire et la guerre froide. Et ses amis ne sont pas plus sereins. « C’est bien ce que je te disais Miguelito. Ce vaccin protège contre la polio, mais pas contre le communisme. / Dommage ! J’aurais bien aimé faire un doublé. » (p. 4) Manolito, Susanita, Felipe, Mafalda et tous les autres sont d’adorables petits bonshommes qui ont de grandes interrogations politiques, sociales et économiques, ce qui est loin d’être de leur âge. « J’ai beaucoup pensé au rôle de l’homme dans le monde et je suis arrivée à la conclusion qu’un rôle ne vaut rien si la pièce est mauvaise. » (p. 9)
L’humour présent dans ces strips naît du décalage entre les inquiétudes exprimées et la maturité improbable de gamins qui feraient mieux d’aller jouer au ballon. Comme Calvin et Hobbes, les bandes dessinées mettant en scène Mafalda expriment un désespoir tout à fait comique et grinçant. « Maman ? / Qu’est-ce qu’il y a ? / Rien. Je voulais seulement m’assurer qu’il y a encore un joli mot qui sert à quelque chose. » (p. 45) Et à l’instar du petit garçon avec son tigre en peluche, Mafalda a des parents qui sont souvent dépassés par la maturité de leur enfant. « Papa, si on trouve les petits bébés sous les choux, ça veut dire que j’ai eu une origine végétale ? / Je peux te dire seulement que tu es mon chou. / Tu te débrouilles pas mal, tu sais ? » (p. 46)
De temps à autre, un album de Mafalda rend le monde un peu moins gris !