Quand son petit ami la quitte en vidant leur appartement, Rinco perd sa voix. « Ma voix était devenue transparente. » (p. 18) Il ne lui reste qu’une jarre de légumes en saumure, un panier et un cœur brisé. Désemparée, elle retourne dans son village natal, auprès de sa mère qu’elle n’apprécie pas vraiment. Pour reprendre sa vie en main, elle décide de mettre à profit ses talents culinaires et d’ouvrir un restaurant dans l’annexe de la maison familiale. « Mon restaurant, je voulais en faire un endroit à part, comme un lieu déjà croisé mais jamais exploré. Comme une grotte secrète où les gens, rassérénés, renoueraient avec leur vrai moi. » (p. 59) Avec l’aide d’un vieil ami, elle met en œuvre son projet. Rapidement, il se murmure que quiconque mange les plats préparés par Rinco voit ses rêves d’amour prendre forme. Son succès professionnel est entier, mais il lui reste à guérir son cœur et à l’ouvrir à sa mère.
Il est ici question d’une soupe d’amour, d’un lapin anorexique et de précieux petits bonheurs. « La moindre petite chose me donnait envie de déposer un baiser sur la joue du Bon Dieu. » (p. 71) Abattue, mais pas vaincue, Rinco poursuit obstinément son voyage vers la sérénité et la paix. Son fanal, c’est son talent aux fourneaux. « Cuisiner était, dans mon existence, comme un arc-en-ciel fragile qui flotterait dans la pénombre. » (p. 13) En nourrissant proches et inconnus, elle fait plus que rassasier des estomacs, elle caresse des âmes et enchante des esprits.
Le style est simple, souvent pauvre et flirte avec l’oralité du témoignage : il s’accorde bien avec les balbutiements d’une voix qui cherche son propre écho. L’histoire est jolie, réconfortante et spirituelle à plus d’un titre, sans philosophie de comptoir ou réflexion biscornue : il n’est question que d’évidences, mais celles-ci échappent parfois à l’œil qui se perd dans ses larmes.