La belle Théodora élève seule sa fille, Eova Luciole, dans une petite île dans les eaux du Venezuela. L’enfant est exceptionnelle, dotée d’une nature profonde et sensible. « Eova Luciole avait en elle une sorte d’instinct qui lui permettait de distinguer le bien du mal. » (p.28) Mais ce qui stupéfie sa mère et tout le village, c’est que la petite est dotée d’ailes blanches comme celles des anges.
Voilà, je n’en dis pas plus de cette sublime histoire et de ses autres personnages. Avec Gabriel Garcia Marquez en exergue, lui le fondateur du réalisme magique, on sait d’emblée qu’on va plonger dans un univers onirique où il ne faut pas vouloir raisonner. Il faut simplement se laisser porter par une histoire où un rosier peut pousser dans la chevelure d’une femme, où des pluies aux allures de déluge peuvent cerner un village pendant des jours et où une enfant peut s’envoler. Face à la beauté étrange d’une réalité très légèrement dissonante, il ne s’agit pas de croire ou de comprendre, mais seulement d’entendre la poésie qui est tellement nécessaire pour affronter la laideur du monde ou survivre aux douleurs profondes des grandes amours perdues. « C’est cela, le désespoir. […] Quand on a décidé que crier, ce n’était plus nécessaire. » (p. 21 & 22)
Il était temps que je lise enfin le premier roman de cette autrice dont j’apprécie tant l’œuvre. Ce texte est lumineux et mélancoliquement mélodieux, comme la légende qu’une vieille grand-mère raconterait à des mômes aux yeux lourds de sommeil avant de tirer sur eux une couverture douce comme une plume. Une fois encore, je vous recommande les autres textes de Clara Dupont-Monod : Le roi disait que j’étais diable, La folie du roi Marc, Nestor rend les armes, La passion selon Juette. Et je vous conseille vivement de lire son prochain roman, La révolte, à paraître en août et que j’ai eu la chance de lire en avant-première.