Roman de Gustave Flaubert. Scénario de Daniel Bardet et dessins de Michel Janvier.
Quand la jeune Emma Rouault épouse Charles Bovary, brave médecin de campagne qui a soigné son père, elle ne se doute pas que sa vie sera morne et monotone. Charles n’a pas d’ambition et se satisfait à merveille de son quotidien rural, mais Emma s’ennuie dans un monde sans passion. « Charles n’est-il pas l’obstacle à toute félicité ? » (p. 13) Pour tromper son ennui, elle prend un amant, puis deux. Pour leur plaire, elle dépense sans compter et contracte des dettes immenses auprès de M. Lheureux, un marchant sans scrupule. Peu à peu, elle s’enfonce dans le vice et le mensonge où tout est bon pour tenter d’échapper à sa vie sans éclat. « Où donc avait-elle appris cette corruption presque immatérielle à force d’être profonde et dissimulée ? » (p. 34) Pour sortir des gouffres où elle s’enlise, Emma Bovary n’aura qu’une échappatoire, forcément tragique.
Je relis souvent ce roman que je considère comme un des meilleurs de Gustave Flaubert. J’ai une grande tendresse pour Emma : certes, cette femme adultère peut être agaçante, mais il ne faut pas oublier qu’elle a grandi dans un monde de fantasmes et de rêves. Sa confrontation à la banalité du quotidien est donc extrêmement brutale et traumatisante et elle explique bien son caractère lunatique et insatisfait. « Vous savez, je peux être gaie ou triste sans raison. » (p. 6)
Un grand bravo à Michel Janvier qui a su rendre la beauté mélancolique et névrosée d’Emma : la jeune femme est comme un marbre superbe qui dissimule une faille qui ne demande qu’à exploser sous un coup trop appuyé de burin. Cette adaptation BD est donc une grande réussite et m’a vraiment enchantée, tout comme le livret bibliographique et historique qui lui fait suite.