La femme révélée

Roman de Gaëlle Nohant.

Dans les années 50, Eliza fuit Chicago, son mari et son petit garçon pour Paris où elle devient Violet. De sa vie aisée, elle n’a gardé que son appareil photo, autant bouclier qu’arme. Dans la ville Lumière, elle se cache autant qu’elle se réinvente. « La vérité, c’est qu’il y a dans nos vies des impasses dont on ne peut s’échapper qu’en détachant des morceaux de soi. » (p. 20) Progressivement, le lecteur découvre à quoi Eliza/Violet a voulu échapper, notamment un mariage fondé sur des illusions et pétri de violence plus ou moins larvée. « À défaut de te montrer enthousiaste, tu pourrais être décorative. » (p. 139) Bien que torturée par l’absence de son fils, l’Américaine n’a pas peur de se battre pour son indépendance et pour les autres, farouchement animée par des idéaux de justice et d’égalité. « C’est humain, tu vois, d’aspirer à la liberté, de ne pas supporter la cage. » (p. 18)

Sur fond de scandale immobilier dans le ghetto noir de Chicago, l’autrice dépeint une ville au bord de la rupture qui, une décennie après le départ de Violet, explose. « Derrière le racisme, il y a la rapacité d’un système qui a besoin de fabriquer des esclaves. » (p. 256) Les figures martyres de Martin Luther King et de Robert Kennedy ne font que couronner la pile des jeunes Américains morts au Vietnam. Et Violet ne cesse de brandir son appareil photo pour saisir la vérité et finir de renouer avec elle. « Mais vous, petite femme blanche dans ce grand pays empoisonné par le racisme, comment vous retrouvez-vous à photographier ces gens ? » (p. 154)

Violet se raconte et se révèle progressivement, comme sortie du bain de ses souvenirs. Dans les premières pages, j’ai craint un roman convenu et cousu de fil blanc, avec une histoire d’amour un peu trop facile. Mais c’est tout le talent de l’autrice d’avoir su me surprendre avec une ellipse qui, loin d’être frustrante, tombe fort à propos. De fait, la dernière partie du roman est celle qui m’a le plus convaincue, au terme d’une lecture finalement très agréable.

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