Les producteurs

Roman d’Antoine Bello.

Suite des romans Les falsificateurs et Les éclaireurs.

Sliv Dartunghuver a donné un nouveau sens au Consortium de Falsification du Réel : il s’agit désormais de porter la vérité au lieu de la modifier. Or, avec l’essor d’Internet et l’explosion des réseaux sociaux, il devient de plus en plus difficile de délimiter ce qui est vrai. « Le concept de vérité n’avait jamais semblé si relatif. […] Tout était vrai et donc rien n’était vrai ; tout était faux et donc rien n’était faux. » (p. 24) Alors que le CFR s’emploie à faire élire Barack Obama et s’interroge sur la véracité des données qui semblent annoncer un réchauffement climatique à l’échelle mondiale, Sliv assiste une nouvelle fois Lena Thornsen dans un projet ambitieux. La belle Danoise veut créer une civilisation maya prônant la concorde. « Raconter une énième histoire me semblait irrémédiablement vain. » (p. 55) Pendant des mois, les deux falsificateurs préparent un scénario complexe, entre créations d’artefacts antiques et plan médiatique complet. Le Consortium le sait : les humains aiment les belles histoires. « L’homme moderne est le fruit de millions d’années d’évolution ; s’il continue à raconter des histoires, il en tire forcément un bénéfice. » (p. 77) Hélas, une fois encore, la pérennité du CFR est menacée lorsqu’une valise contenant des dizaines de scénarios est égarée par un agent, et d’autant plus quand certains de ces scénarios commencent à se réaliser. « Mais qu’est-ce que ça veut dire ? Que nous ne faisons qu’anticiper l’actualité ? / […] Pourquoi ferions-nous advenir des événements dont nous pensons qu’ils arriveront de toute façon ? » (p. 401)

Avec le troisième et dernier volet de sa trilogie, Antoine Bello achève d’explorer les mécanismes de construction et de réception de l’information, sans cesser de souligner le volet politique et économique de ce que l’Histoire choisit de retenir comme la vérité. La postface fictive du livre est surprenante et donne une dimension nouvelle à l’œuvre. Je ne doute pas que l’auteur aurait pu produire encore quelques tomes autour du Consortium de Falsification du Réel, mais comme l’a souvent constaté Sliv Dartunghuver, la qualité prime sur la quantité.

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