Tony, Roz et Charis sont amies. Elles se sont rencontrées à l’université, mais ce qui a fondé leur amitié, c’est Zenia qui leur a successivement dérobé leurs compagnons, après avoir trompé leur confiance. « Zenia est une sale histoire, il vaut mieux l’oublier. Pourquoi tenter de découvrir ses mobiles ? » (p. 9) Les trois femmes se portent mieux depuis qu’elles ont appris la mort de cette terrible séductrice, mais surprise ! la troublante et vénéneuse Zenia est de retour. Pourquoi et pour qui est-elle de retour, Tony, Charis et Roz ne trépignent pas de le savoir. Chacune se souvient de sa rencontre avec cette femme éblouissante, de son amitié vorace et de sa trahison. Chacune repense aussi à son enfance et fait défiler les minables figures parentales dont elles ont dû se défaire pour grandir. À leur manière, chacune de ces femmes incarne une facette de la féminité : l’intellectuelle, la spirituelle et l’active, ou encore la guerrière, la prêtresse et l’ouvrière. Mais face à elles se dresse la Femme : Zenia contient en elle une féminité totale et destructrice. « Tony pense que Zenia est aussi vulnérable qu’un bloc de béton. » (p. 225) Donc, voilà, Zenia est de retour : Tony, Roz et Charis doivent décider ce qu’elles feront pour se débarrasser définitivement de cette menace en talons hauts.
Avec férocité, Margaret Atwood parle de compétition sexuelle et de jalousie, mais en creux, elle peint surtout la médiocrité des hommes, toujours prompts à abandonner une compagne imparfaite, mais solide, pour les beaux atours d’une diablesse sans cœur. Le roman n’est pas manichéen : hormis la femme du titre, les personnages sont subtilement caractérisés et évoluent sur la large palette des émotions humaines. Mais Zenia prend très peu la parole et tout ce qu’elle dit n’est que mensonge ou poison. « On sait quel mal se love dans le cœur des femmes ? » (p. 110) Elle est l’ennemie à abattre, puisque les hommes ne sont que des dommages collatéraux, certainement pas des alliés. Je ne me lasse pas de découvrir l’œuvre de Margaret Atwood et je range ce roman sur mon étagère féministe.