Roman de Junichiro Tanizaki.
Un professeur d’université et sa femme se livrent à un jeu pervers. Par journaux intimes interposés, ils disent tout – ou presque – de leur vie intime. À l’âge du démon de midi, le professeur est plus que jamais avide de plaisirs sensuels, mais il se heurte aux désirs exacerbés de son épouse, bien plus jeune que lui. Il découvre que la jalousie est un stimulant amoureux extraordinaire, et il jette sa femme dans les bras du fiancé de leur fille, ce qui a pour effet de décupler son désir. Insatiable, il se gave de potions et d’excitants pour satisfaire les exigences de son épouse. Jusqu’à l’issue fatale qui révèle comment sa femme a tout orchestré.
Excellent ! La construction du récit est fameuse. Tantôt on lit le journal de l’époux, tantôt celui de l’épouse, avec deux langages et deux points de vue différents. Tout n’est que fausse dissimulation et vraie traitrise. Impossible pour le lecteur de ne pas pressentir l’issue. J’ai particulièrement apprécié la finesse avec laquelle les jeux érotiques sont décrits: pas de mots grossiers, tout n’est que suggestion et image. Le huis clos est imperceptiblement bâti, mais il est omniprésent. Les nombreuses sorties des protagonistes ne sont que des leurres, ils sont cloîtrés dans leurs névroses respectives. Voilà un livre d’une grande finesse, mais aussi d’une profonde perversité. Rien n’est clairement exposé. Pourtant les narrateurs ne dissimulent rien. Du grand art !