Essai de Michel Pastoureau.
Du costume des jongleurs ou des bourreaux au tristement célèbre pyjama rayé des détenus concentrationnaires, du pelage du tigre au cuir lustré du zèbre, de la marinière à la livrée domestique, des chasubles sportives à l’uniforme militaire ou sportif, de l’héraldique des blasons aux drapeaux nationaux, jusqu’au code de la route et aux rayures des dentifrices, Michel Pastoureau retrace l’histoire culturelle des tissus rayés et de la rayure qui « n’est pas une forme, comme le besant, l’étoile ou la rouelle, c’est une structure. » (p. 29)
Du « caractère dévalorisant, péjoratif ou nettement diabolique de la rayure vestimentaire » (p. 11), l’auteur démontre comment « la rayure médiévale était cause de désordre et de transgression » avant que « la rayure moderne et contemporaine [se soit] transformée en instrument de mise en ordre. » (p. 15)
La notion culturelle (et non oculaire !) qui prétend que les rayures verticales agrandissent l’espace et que les rayures horizontales le tassent n’est pas tout. La rayure véhicule des traditions d’exclusion, de mise à l’écart voire de mise à l’index et de distinction. Les porteurs de tissus rayés furent tour à tour exclus, diabolisés, puis consacrés et reconnus.
La rayure n’est jamais neutre: aujourd’hui encore elle singularise et elle frappe les esprits. Les frères Dalton et leur casaque jaune et noire, Coluche et sa salopette ou Picasso dans sa marinière sont autant de représentants divers de la rayure.
Ce court essai est très bien écrit, même si je reproche à l’auteur d’être un tantinet trop assertif voire péremptoire dans ses affirmations. Mais il défend avec conviction et documents à l’appui des idées clairement exprimées et parfois originales.