Bande dessinée de Caroline Guillot, tirée de son blog Trash Cancan.
Mérovingiens, Carolingiens Capétiens, Valois et Bourbons. Voilà les grandes familles royales qui ont fait la France au gré des conquêtes, des alliances, des mariages et des traités. Mais ici, on vous montre le dessous des cartes, le dessous des tables et les dessous tout court. Regorgeant de détails loufoques, grotesques, mais surtout sanglants, cette histoire de France n’est pas celle qu’on apprend sur les bancs de la communale. Qui n’aime pas les cancans, ces secrets plus ou moins bien gardés ? Quel roi a refilé la syphilis à son épouse après lui avoir dédié des prunes ? Quelle future reine de France a vu son premier mariage consommé par procuration, quand le représentant de son époux a glissé sa jambe nue dans son lit ? Quelle reine a préféré voir ses fils morts plutôt que tondus ? Quel roi est mort de la gangrène après avoir perdu des petits bouts de lui-même un peu partout ? Vous saurez tout cela et bien plus en ouvrant la bande dessinée de Caroline Guillot.
L’auteure le dit dans son introduction, elle retient surtout les détails cocasses de l’histoire. Et elle sait étendre cette cocasserie à ses dessins et aux propos qu’elle prête aux grands noms de l’histoire. Ainsi, on surprend un dialogue des plus savoureux entre Charlemagne enfant et sa mère : « Pff ! Roi, ça craint comme taf. Moi, je serai empereur ! / Passe ton sacre d’abord ! » (p. 25) Caroline Guillot n’a pas son pareil pour simplifier les choses sans les appauvrir. Évidemment, sa bande dessinée ne suffit pas à cerner l’histoire de France puisqu’elle s’attarde sur des faits plus ou moins mineurs, mais elle a l’immense mérite de donner envie d’en savoir plus. Et parfois, appeler un chat par son nom, c’est tellement plus drôle que de prendre des pincettes ! Un exemple hilarant avec les persécutions cathares : « Une grande question se pose alors : comment différencier un cathare d’un bon chrétien ? Le légat du pape simplifie les choses en certifiant que Dieu reconnaîtra les siens et qu’il faut zigouiller tout ce qui bouge ! » (p. 46) Voilà voilà…
Les dynasties royales sont présentées dans des généalogies claires qui n’omettent rien des multiples mariages de certains rois et des nombreuses répudiations. La couronne de France change de tête plus souvent qu’à son tour, au gré des successions directes, des mariages, des meurtres et de bien d’autres faits largement sanglants dont l’histoire de France regorge. Le sous-titre annonce une véritable histoire de France. Tout à fait véridique, elle est également redoutable puisqu’il ne faisait pas bon être roi ou proche du roi : nombreuses sont les têtes qui sont tombées, et ce, bien avant l’arrivée de la guillotine !
Bien que légèrement caricaturaux, les dessins de Caroline Guillot rendent parfaitement hommage aux visages des souverains français. Vous les reconnaîtrez tous, je vous le garantis ! Toute en camaïeu de gris, l’image s’agrémente très souvent d’un beau rouge vermillon qui ne cesse de goutter d’une page à l’autre. Le titre vous avait prévenu : c’est trash ! L’auteure a adapté le langage des personnes à notre époque et à ses codes : ainsi, des amoureux s’échangent leur pigeon voyageur pour pouvoir s’envoyer des mots doux. Il y a de nombreux clins d’œil au cinéma et à la culture populaire.
Et le petit plus absolument délirant et indispensable, ce sont les jeux qui parsèment la bande dessinée. Ça vous dit de faire une partie de jeu de l’oie façon Saint-Barthélémy ? Choisissez votre pion : vous pouvez être un Valois, un Guise ou un réformé. Et selon votre chance aux dés, vous perdrez un tour à massacrer des huguenots ou à forniquer avec Margot… Trash ? Oui, on vous l’a déjà dit ! Voyez par vous-même, si vous avez choisi d’être un réformé. « 8 : Vous vous amusez à crucifier des curés lors de la Michelade. Passez un tour pour enlever vos échardes. 10 : La mort de votre chef Condé vous déprime, vous ne faites plus rien jusqu’à ce que quelqu’un arrive. 13 : La Saint-Barthélémy a anéanti une partie de vos soldats, vous passez 2 tours à les soigner. 14 : La Rochelle a résisté aux assauts de la Ligue ! Heureux comme un pape, vous partez raser Montpellier, case 27. 23 : Le culte protestant est interdit, vous retournez case 18 prier tranquillement. 29 : La conversion d’Henri 4 vous protège, marchez tranquillement jusqu’à la case 32. » (p. 93)
Bref, si tout est rigoureusement exact, tout est surtout foutrement drôle et je vous mets au défi de ne pas hurler de rire devant les scènes si férocement croquées par Caroline Guillot !