Roman graphique de Richard Guérineau, d’après le roman de Jean Teulé.
À vingt-deux ans, Charles IX est encore un enfant manipulé par sa mère, Catherine de Médicis. Aujourd’hui, ce que veut la reine mère, c’est la disparition des protestants et elle exhorte son fils d’accepter un bain de sang qui deviendra le tristement célèbre massacre de la Saint-Barthélémy. « Je croyais que, lundi, on avait marié ma sœur Marguerite au protestant Henri de Navarre en signe de réconciliation entre les deux religions. En fait, vous voudriez faire tuer tous les chefs huguenots venus de la France entière pour assister à la noce ? / Ben justement… puisque toute l’aristocratie se trouve réunie à Paris, on s’est dit que ce serait dommage de ne pas en profiter. » (p. 5) Nullement opposé aux protestants, mais acculé par sa mère et pressé par ses conseillers, Charles IX consent au massacre et prononce cette phrase qui entre dans la légende : « Tuez-les, mais tuez-les tous ! Qu’il n’en reste pas un seul pour venir un jour me le reprocher ! » (p. 16) Et c’est ainsi que le 24 août 1572, les rues et les eaux de Paris se teintent de sang. Traumatisé par la macabre décision qu’il a dû prendre, Charles IX sombre dans le remords et la folie et tente de s’étourdir à la chasse ou dans les vers des poètes. Mais partout, tout le temps, il ne voit que du sang et c’est ainsi qu’il meurt, vidé par une mortelle suée d’hémoglobine. « C’est tout le sang que j’ai fait verser qui ressort de ma peau. » (p. 106)
Le dessin est vigoureux et dynamique : ce roman graphique n’est pas pour les mauviettes ! La couleur sang domine : Charly 9, c’est un peu Cinquante nuances de rouge. Vermillon, carmin, grenat, écarlate, pourpre et j’en passe ! Ça gicle, ça dégouline et ça tache. Le texte a la verve gouailleuse de Jean Teulé et l’humour noir de cet auteur fait parfois surgir une bouffonnerie grotesque au milieu de la sauvagerie. C’est le cas des quelques planches au style emprunté à de célèbres dessinateurs de bande dessinée. Hommages à Hergé ou à Peyo, ces intrusions intertextuelles allègent l’atmosphère pesante et macabre de l’histoire de Charles IX, roi faible pris à la gorge par la culpabilité et la politique intransigeante de sa mère.
Jusqu’à présent, pour moi, Charles IX avait les traits de Jean-Hugues Anglade dans le film de Patrice Chéreau. Le roman graphique de Richard Guérineau donne une autre dimension à ce roi maudit. Il ne me reste qu’à lire le roman de Jean Teulé.