Dans une vieille maison de la rue Saint-Denis, M. Guillaume tient avec rigueur et tradition son commerce de maître drapier. La marche du ménage est parfaitement réglée, sous les soins de Mme Guillaume : les deux filles de la maison, Virginie et Augustine, ne connaissent rien du monde et n’ont pas d’autres projets que ceux que leurs parents forment pour elles. M. Guillaume marierait bien son aînée avec son premier commis et tant pis si celui-ci est épris de la cadette qui n’a d’ailleurs d’yeux que pour Théodore, un peintre aperçu par la croisée. Si, finalement, les mariages s’arrangent à peu près comme tout le monde le voudrait, l’union d’Augustine et de Théodore, bien qu’initiée sous de riants auspices, fait naufrage, tant les époux sont mal assortis. Que peut faire Théodore, génie créatif et noble dispendieux, d’une épouse à l’esprit simple, voire fruste, qui ne sait que l’adorer ?
En moins de cent pages, Honoré de Balzac tire à boulets rouges contre la bourgeoisie commerçante et sa supposée médiocrité d’esprit. L’auteur méprise la passion de l’argent qui ne se traduit que par l’économie, voire la pingrerie. « N’ai-je pas entendu dire ce soir à ce jeune écervelé que si l’argent était rond, c’était fait pour rouler ? S’il est rond pour les gens prodigues, il est plat pour les gens économes qui l’empilent. » (p. 56) Voilà qui n’est pas sans annoncer l’avarice pathologique du père d’Eugénie Grandet et qui entre en totale opposition avec la conception personnelle de l’auteur : prodigue au-delà du raisonnable, accablé de dettes tout au long de sa vie, Honoré de Balzac n’était pas de ceux qui comptent et qui retiennent. Cette nouvelle présente l’étendue du talent de Balzac et sa très grande maîtrise dans l’art de faire des portraits inoubliables.