Une biologiste, une anthropologue, une géomètre et une psychologue constituent la douzième expédition envoyée dans la Zone X. « Notre mission était simple : poursuivre l’enquête gouvernementale sur les mystères de la Zone X en progressant lentement à partir du camp de base. » (p. 6) Que s’est-il passé ici ? Un cataclysme ? Une contamination ? Tout semble familier, mais le danger est partout et la Zone X influence ceux qui s’y trouvent en modifiant leur comportement, parfois jusqu’à la folie, souvent jusqu’à la mort. « Voir de la beauté dans la désolation change quelque chose en vous. La désolation tente de vous coloniser. » (p. 7) Les membres des précédentes expéditions ont tous disparu dans des circonstances troubles. Les quatre femmes trouvent une tour qui s’enfonce sur la terre, étrange bâtiment qui n’est indiqué sur aucune carte. Sur les murs, il y a des mots vivants et, dans les escaliers, une étrange créature s’enfonce vers les profondeurs. « C’est ainsi que la folie du monde essaie de vous coloniser : de l’extérieur, en vous forçant à vivre dans sa réalité. » (p. 82)
Le récit est porté par la biologiste qui devient rapidement insensible aux manœuvres d’hypnose de la psychologue. Quelque chose ne va pas dans cette expédition : les consignes ne sont pas identiques pour tout le monde et bien des choses se révèlent et viennent troubler les certitudes des protagonistes. Chaque découverte est un nouveau mystère qui prouve les mensonges du gouvernement. « C’était une mise à l’épreuve d’une confiance fragile. De notre curiosité et de notre fascination qui allaient bord à bord avec notre peur. Un test pour savoir si nous préférions l’ignorance ou le danger. » (p. 46) La biologiste rédige un journal, mais pour qui ? À qui s’adresse ses révélations et ses analyses ? L’identité des personnages est réduite à leur métier au sein de l’expédition. « Les sacrifices n’avaient pas besoin de nom. Les gens remplissaient une fonction n’avaient pas besoin d’être nommés. » (p. 100) Mission après mission, tous disparaissent et le mystère de la Zone X reste entier.
Dans la veine post apocalyptique, ce roman tire honorablement son épingle du jeu. En se concentrant sur un seul personnage et en observant les effets de la Zone X sur son comportement et ses pensées, l’auteur invite le lecteur à partager l’expérience du protagoniste, entre angoisse et émerveillement. Il n’en faut pas beaucoup plus pour créer une atmosphère unique, viscérale et qui colle à la peau. Annihilation est une courte dystopie de très bonne facture.