Premier roman d’Atticus Lish. À paraître le 18 août.
Quatrième de couverture : C’est dans un New York spectral, encore en proie aux secousses de l’après-11 septembre, que s’amorce l’improbable histoire de Zou Lei, une clandestine chinoise d’origine ouïghoure errant de petits boulots en rafles, et de Brad Skinner, un vétéran de la guerre d’Irak meurtri par les vicissitudes des combats. Ensemble, ils arpentent le Queens et cherchent un refuge, un havre, au sens propre comme figuré. L’amour fou de ces outlaws modernes les mènera au pire, mais avant, Lish prend le soin de nous décrire magistralement cette Amérique d’en bas, aliénée, sans cesse confinée alors même qu’elle est condamnée à errer dans les rues. Il nous livre l’histoire de ces hommes et de ces femmes qui font le corps organique de la grande ville : clandestins, main-d’œuvre sous-payée, chair à canon, achevant sous nos yeux les derniers vestiges du rêve américain.
Ce premier roman est viscéral et percutant, les personnages sont sombres et attachants. Zou Lei est animée par une volonté puissante et indestructible : elle veut trouver sa place aux États-Unis. Elle accepte tous les boulots, endure tous les mauvais coups et extériorise sa rage dans la musculation. Skinner, tout entier rongé par le traumatisme de la guerre, erre dans un pays qui ne veut plus de lui. Confronté à une société qui rejette les exclus qu’elle a créés, il s’accroche à Zou Lei, à son traitement et à l’illusion d’une vie normale. « Il n’y a que pour certaines personnes que l’amour fait tourner le monde, dit Skinner. / C’est quoi qui tourne le monde ? / Franchement ? La guerre. / La guerre ? / Ou plutôt, je dirais d’abord l’argent. L’argent, et ensuite la guerre. Tout le monde se la joue, genre, on est patriote, le drapeau, toutes ces conneries bien-pensantes. / La société a besoin hommes et femmes courageux pour se battre. » (p. 177) Hélas, leurs solitudes conjuguées ne parviennent pas conjurer l’isolement, la peur et les angoisses. Face à la violence des autorités, du système et des hommes, Zou Leu et Skinner ne peuvent compter que sur eux-mêmes, et ce n’est certainement pas suffisant pour survivre dans cette Amérique qui écrase les êtres comme des insectes. « Plus la vie devenait terrible, plus elle avait besoin d’être heureuse avec lui. » (p. 357)
Je ressors de cette lecture très impressionnée par le talent de l’auteur, mais également très triste et appesantie par le désespoir des personnages et la fatalité de l’intrigue. Parmi les loups et les bandits est un très grand roman qui n’a pas volé ses prix en Amérique, mais qu’il faut aborder avec force, en se ménageant des portes de sortie.