Entretiens avec Fabrice Lardreau.
Puisqu’il est vain de vouloir résumer des entretiens, voici ce qu’annonce la quatrième de couverture :
« Ce qui me plaît dans la montagne comme dans l’écriture, c’est de me trouver confronté à quelque chose qui me dépasse, de façon humaine, et d’essayer d’y trouver ma voie, que ce soit sur une paroi ou dans un roman. » Passionné d’escalade et d’alpinisme, amoureux de littérature alpine, admirateur des pionniers des sommets, Philippe Claudel nourrit depuis l’enfance une passion viscérale pour le milieu d’altitude. Espace physique, mais aussi livresque, la montagne entretient de nombreuses analogies avec l’écriture : l’alpiniste et l’écrivain, des conquérants de l’inutile ? Tous deux se rejoignent dans ce lieu essentiel, empreint de passion et d’humilité. »
J’ai tendance à me ruer sur tous les nouveaux textes de Philippe Claudel. Mais devant cette œuvre, il faut un peu de retenue. On n’aborde pas un versant escarpé en sandales. Et on n’aborde pas ces entretiens au pas de course. On voudrait se presser que l’on serait retenu, happé par l’exaltation ressentie par Philippe Claudel. On est aussi frappé par l’humilité dont il fait preuve devant les cimes et leurs figures héroïques.
C’est avec admiration qu’il parle des auteurs des hauteurs, ceux qui ont mis leurs pas et leur plume dans des traces de neige fraiche et sur des sentiers pierreux. « Aller au refuge, y dormir, et aller en montagne plus généralement, c’est tenter de retrouver une forme de simplicité essentielle. Redéfinir ce que nous sommes, quels sont nos besoins vitaux. […] J’ai toujours essayé de retrouver dans les refuges où j’ai dormi l’image archétypale du refuge littéraire découverte dans tant de livres. » (p. 46 &47) Et c’est avec joie et fierté qu’il fait découvrir la montagne à des proches. C’est un cadeau double : offrir et partager ces paysages vertigineux.
Évidemment, impossible de ne pas trouver de similitudes entre l’écriture et l’alpinisme. « J’ai toujours établi un parallèle entre le fait de grimper et celui d’écrire. Ce qui me plaît dans la montagne comme dans l’écriture, c’est de me trouver confronté à quelque chose qui me dépasse, de façon humaine, et d’essayer d’y trouver ma voie, que ce soit sur une paroi ou dans un roman. » (p. 67) Ce faisant, pour moi qui ne pratique pas les hauteurs, Philippe Claudel est un guide dans les chemins qu’il trace dans la littérature contemporaine. Ce sont des voies exigeantes où l’émotion donne le vertige. Souvent, grisée par la beauté des mots de cet auteur, je voudrais ne jamais en revenir. Douce hypoxie littéraire…
Ces entretiens se savourent comme des confidences tant l’on sent que Philippe Claudel se livre et se dévoile quand il parle de la montagne. Le lieu essentiel, c’est celui où l’on ne se dissimule pas, ni aux autres ni à soi-même. « Je me trouve au diapason de moi-même. Elle me donne le la. » (p. 76) L’ouvrage s’achève sur quelques textes choisis où la montagne est plus qu’un élément du décor : elle en est la justification.
Fabrice Lardreau est l’auteur des excellents Nord absolu et Un certain Petrovitch. Quant à Philippe Claudel, je crois que j’en ai déjà un peu parlé sur ce blog…