Roman d’Alice Kiner.
En 1310, les béguinages de France ne savent pas qu’ils vivent leurs dernières années de tranquillité. « Toute femme n’étant ni épouse ni nonne est suspecte. Surtout lorsqu’elle s’acharne à prêcher, usurpant les privilèges du clergé. Et des hommes. » (p. 65) L’accusation d’hérésie et la condamnation de la béguine Marguerite Porete, autrice du Miroir des âmes simples et anéanties, sont les premiers indices de cette fin imminente. L’exécution des Templiers, ordre religieux qui a refusé de se soumettre à l’autoritarisme de Philippe Le Bel, est un autre funeste présage. De partout s’élèvent des voix pour critiquer les béguines et leur reprocher les pires vices. Il devient insupportable que des femmes soient libres, sans époux ni règle religieuse, qu’elles conservent leurs biens, exercent une activité et vivent en communautés, « une citadelle pour les femmes, pas une prison » (p. 15) Au grand béguinage de Paris, l’arrivée de Maheut la Rousse, jeune fille en fuite, lance un incendie qui va longtemps couver sous la braise, balayant d’autres béguines, mais aussi des religieux et des laïcs.
Le roman s’étire sur une dizaine d’années : les jeunes gens gagnent en maturité, des enfants naissent, des personnes meurent, et l’Histoire embarque dans son flot des destinées célèbres ou anonymes. Si le texte se lit facilement, c’est malheureusement en raison d’une narration et d’un style un peu faibles. Mais La nuit des béguines offre une bonne entrée en matière à ceux et celles qui voudraient découvrir l’histoire de ces communautés de femmes. Et je vous conseille surtout le roman de Clara Dupont-Monod, La passion selon Juette, qui présente l’histoire d’une véritable béguine que les Belges célèbrent encore.