Bande dessinée de Luca de Santis et Sara Colaone.
Née en 1887 et décédée à 99 ans, Georgia O’Keeffe est très certainement à raison considérée comme la peintre abstraite la plus célèbre du monde. Très jeune, elle savait que sa vie entière serait consacrée à son travail. « Je suis décidée à placer mon art au-dessus de tout. » (p. 12) Elle n’avait besoin de personne pour faire ses preuves, mais c’est en partie sa relation avec le photographe Alfred Stieglitz qui lui ouvre la voie du succès. Entre amour et inspiration mutuelle, leur mariage a été intense, voire douloureux pour Georgia. Toute sa carrière, elle s’est acharnée à se détacher et à affranchir son image des nus que son mari a faits d’elle, à exister loin de ce corps de femme auquel les critiques et le public voulaient systématiquement la rattacher. Et longtemps, elle a eu le sentiment que son art était incompris, injustement rapporté à sa féminité. « Je n’aime pas vous voir ghettoïser mon art, en parler comme s’il était équivalent et séparé, comme si on pouvait séparer l’art selon pénis ou vulve ! » (p. 43) En quête sans cesse renouvelée de son identité, l’artiste a toujours refusé de transiger ou de s’adapter à ce qu’on attendait d’elle. Ses œuvres rencontrent un succès phénoménal et se vendent à des prix de plus en plus fous. Mais pour Georgia O’Keeffe, ce n’est pas encore assez. Elle voudrait être artiste, pas artiste femme. « J’aurai donc la vulve la plus précieuse du monde ! » (p. 177)
Des fleurs gigantesques, des crânes et des ossements, des paysages urbains novateurs, des grands flux de couleurs abstraits et vibrants, tout cela, c’est Georgia O’Keeffe. Son œuvre fait actuellement l’objet d’une exposition au Centre Pompidou et j’espère avoir le temps de la visiter ! Cette bande dessinée montre le tempérament excentrique de la peintre et sa relation complexe avec son mari, ainsi que les difficultés de gestion de la collection que Stieglitz a laissée à sa mort. Georgia a été une muse, sans aucun doute, mais certainement pas une potiche !