Rêves de femmes

Recueil de nouvelles de Virginia Woolf, précédé par l’essai Les femmes et le roman.

En prenant la plume, les femmes ont longtemps uniquement parlé d’elles-mêmes, de leurs expériences propres, dans le champ de l’existence qu’il leur était donné de connaître. À mesure que l’instruction des femmes s’est développée, les autrices ont commencé à parler des femmes en général et de ce qu’elles vivent, sous un prisme plus large. « Nul doute que, dans la vie comme dans l’art, les valeurs des femmes ne sont pas celles des hommes. C’est pourquoi quand une femme en vient à écrire un roman, elle n’a de cesse de modifier les valeurs établies, pour rendre intéressant ce qui semblerait insignifiant à un homme et trivial ce qui lui semblerait important. » (p. 10) Dans cet essai de quelques pages, il y a le germe de Une chambre à soi.

Dans les nouvelles, l’autrice explore différents mondes féminins. Pendant une nuit dans un pensionnat de jeunes filles, les résidentes discutent sous la lumière de la lune. Ailleurs, un groupe de femmes décident de s’interroger sur le monde avant de devenir mères, afin d’être à égalité avec les hommes. « Tandis que nous portons des enfants, eux-mêmes […] enfantent des livres et des tableaux. Nous, nous peuplons le monde. Eux, ils le civilisent. » (p. 22) Pendant une après-midi d’été, une femme dort sous un pommier, et sa lecture interrompue se mêle à ses songes. Dans un salon, des femmes échangent des considérations sur le célibat et certaines épingles qui ne piquent pas. Un jeune couple se plaît à inventer un monde grouillant de charmantes bestioles. « Quand il mordait dans un toast, il faisait penser à un lapin. […] Son nez remuait très légèrement quand il mangeait. Comme celui de son cher lapin apprivoisé. » (p. 49) Enfin, un veuf lit les journaux intimes de sa défunte épouse et découvre bien des secrets.

Avec ces textes, Virginia Woolf affirme l’autonomie et l’indépendance des femmes, le droit de ces dernières de penser, aimer, désirer et refuser, loin du carcan du mariage et de la bourgeoisie. Elle se glisse dans l’intimité des femmes seules ou en communauté et met en valeur la sensibilité profonde de ce deuxième sexe. Je n’avais pas apprécié Mrs Dalloway de cette autrice, mais j’ai dévoré les nouvelles de ce recueil qui prend place sans tarder sur mon étagère de lectures féministes.

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