Il pleuvait des oiseaux

Roman de Jocelyne Saucier.

« L’histoire est peu probable, mais puisqu’il y a eu des témoins, il ne faut pas refuser d’y croire. On se priverait de ces ailleurs improbables qui donnent asile à des êtres uniques. » (p. 11) Cette histoire, c’est celle de trois vieillards qui ont choisi de s’isoler dans les bois pour finir leur vie loin de la société, de l’administration et de la médecine. Chacun dans leur cabane et avec leurs chiens, ils se contentent d’un confort rudimentaire et jouissent de la plus grande liberté qui soit : celle de choisir quand vivre et quand mourir. « La région a plusieurs de ces endroits qui résistent à leur propre usure et qui se plaisent dans cette solitude délabrée. » (p. 16 et 17) Deux hommes plus jeunes, aux activités flirtant ouvertement avec l’illégalité, protègent l’ermitage secret. Arrive une photographe qui documente les terribles feux qui ont ravagé la région dans les années 1910 et 1920. « Dans l’embrouillamini des récits, une figure revenait toujours, celle d’un garçon aveugle marchant dans les décombres fumants. » (p. 93) Puis survient une très vieille femme qui n’a connu que l’enfermement et qui commence seulement à vivre. La communauté du lac s’en trouve définitivement bouleversée. Tous·tes ces exclu·es, ces oublié·es, ces sauvages dont personne ne veut et qui ne veulent plus du monde imaginent leur propre société et leurs propres codes. « Ils ne laisseraient pas l’autre se dissoudre dans la souffrance et l’indignité en regardant le ciel. » (p. 44)

J’ai pris ce roman dans une boîte à livres pour la seule poésie de son titre, titre dont le sens est douloureusement beau. Avec quelle tendresse j’ai suivi cette troupe de personnages ! Sous les époustouflants horizons du Canada, c’est une humanité qui se réinvente, loin des dogmes et des aprioris. « La folie n’était peut-être que cela, un trop-plein de tristesse, il fallait simplement lui donner de l’espace. » (p. 110) La mort est omniprésente, mais elle n’est pas pesante : bien qu’inéluctable, elle n’est jamais un couperet. J’ai tant pleuré à la fin du roman, tant souhaité que le refuge se referme sur ces êtres singuliers. Il me faut maintenant trouver le film de Louise Archambault.

Ce contenu a été publié dans Mon Alexandrie. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.