Poèmes de Maurice Rollinat
Le lièvre (in Dans les brandes, poèmes et rondels)
Le lièvre et blessé et il boîte. Avant que le narrateur n’ait le temps de le rejoindre et de le soigner, l’animal est déjà mort. « Et quand j’arrivai le front moite, / Hélas ! il avait trépassé, / Le lièvre, le long du fossé. »
En 13 vers, Maurice Rollinat ne laisse aucune chance à l’animal. Mais le processus naturel de la vie et de la mort n’est pas présenté comme funeste et cruel. Il est logique, peut-être triste, mais ne dois susciter aucune révolte. La mort du petit animal n’est qu’une étape, qu’un élément dans un ensemble qui fonctionne systématiquement et immuablement.
Le petit lièvre (in Les névroses)
Le levraut vaque à ses occupations de levraut, à savoir s’échapper des fourrés, lever le museau et remuer la queue, sentir tous les vents pour identifier une menace, mâchouiller un brin d’herbe et rêver d’une plante plus savoureuse.
Rien de palpitant, me direz-vous. Mais la force de ce poème réside dans l’évocation : le poète convoque des images très dynamiques devant les yeux du lecteur. Et, plus que la vue, il en appelle à tous les sens dans une synesthésie saisissante : pas un bruissement, ni un fumet n’échappent au levraut et le lecteur, à son tour, est aux aguets, prêt à sursauter si une ombre passe trop près. « N’entend-il pas quelqu’un ? / Non ! ce n’est que la brise / Qui caresse et qui grise / Son petit corps à jeun. »
*****
Entre pastorale et macabre, la poésie de Maurice Rollinat tente d’illustrer la nature qui s’oppose vivement à la société de l’homme, plus sombre et moins idyllique. Le poète est tombé dans l’oubli après un succès relatif au 19e siècle. Mais Wikisource est là et nous offre des œuvres bien peu accessibles !