Six ans après leur mariage, Elizabeth et Darcy vivent un parfait bonheur avec leurs deux fils et leurs nombreux amis. Alors qu’ils préparent leur bal annuel, Lydia, la jeune sœur d’Elizabeth, frappe à la porte de Pemberley. Depuis qu’elle a épousé Wickham, jeune officier qui avait tenté de séduire la sœur de Darcy, Lydia n’est pas vraiment la bienvenue dans la demeure des Darcy. Mais il fait nuit, le vent rugit dans les bois et la jeune femme est hystérique. Quelque part, dans la forêt, Wickham a disparu avec son ami Denny et des coups de fusils ont retenti. « Il n’est guère d’avantage social à attendre du meurtre brutal d’un capitaine d’infanterie ordinaire, sans argent ni lignage susceptible de lui prêter quelque intérêt. » (p. 211) Et de fait, Darcy et son cousin Fitzwilliam trouvent un cadavre dans les bois de Pemberley. Wickham est-il coupable ? Si oui, de quoi faut-il l’accuser ?
Passé le premier plaisir de retrouver les personnages de Jane Austen, j’ai été bien en peine de retrouver leur caractère. L’intérêt principal d’Orgueil et préjugés réside dans l’opposition entre les deux caractères, plutôt bien trempés, d’Elizabeth et Darcy. Ici, il n’y a qu’harmonie conjugale et concorde amoureuse entre eux. C’est très joli et fleur bleue, mais ça manque du piquant qui rend le chef-d’œuvre de Jane Austen si délicieux. Quel intérêt trouver à Darcy s’il n’est pas un très riche gentilhomme aux idées un peu bornées et à Elizabeth si elle n’est pas un peu finaude et taquine ? P. D. James essaie d’expliquer le comportement des deux héros dans le roman de Jane Austen, mais ses démonstrations sont artificielles et quelques peu grotesques. Il est tout à fait inutile, voire dommage, de décortiquer des personnages dont la complexité donne tout son sel aux joutes verbales qui les opposent.
Une suite policière à Orgueil et préjugés ? Shocking ! L’intrigue est assez plate et n’a pas vraiment su m’intéresser, tant j’avais pressenti que Wickham resterait Wickham, ce qui suffit à résumer le personnage pour qui a lu le roman de Jane Austen. P. D. James a saupoudré son texte de fantômes, de vieilles rancunes et de promenades nocturnes secrètes, autant d’éléments que l’on pourrait trouver dans des romans de la grande Jane, mais qui sont loin d’être exploités avec le même talent. Ce roman n’est pas ignominieux, mais il ne peut se comparer à l’œuvre dont il prétend être la suite.
Pour finir, je m’indigne : l’auteure a choisi de redessiner la figure du colonel Fitzwilliam, le cousin de Darcy. Ce n’est plus le parfait gentleman d’Orgueil et préjugés, mais un homme avec des défauts et des zones d’ombre. Certes, dans la réalité, les hommes ont des défauts, mais le colonel Fitzwilliam est au-dessus de cette masse. Fallait pas toucher au colonel, Madame ! Non, fallait vraiment pas ! Je vais retrouver le texte original de Jane Austen et la perfection de son style.