Le vent dans les saules

Roman de Kenneth Grahame.

C’est le printemps dans la campagne anglaise. Mr Taupe abandonne le grand ménage de son terrier et part en promenade à la surface. Voilà qu’il rencontre Mr Rat qui s’adonne au plaisir du canotage. Les deux amis décident de partir sur la rivière et de faire un pique-nique. « Il n’y a rien de plus délicieux au monde, mais absolument rien, vous m’entendez, que de traînasser de cette façon, […] simplement de traînasser dans une barque… de traînasser. » (p. 23) Mr Taupe et Mr Rat décident de ne plus se quitter et habitent tantôt chez l’un, tantôt chez l’autre.

C’est ainsi que Mr Taupe abandonne les profondeurs obscures de son terrier pour découvrir enfin le monde. Avec Mr Rat et Mr Crapaud, il va plus loin qu’il n’aurait jamais pensé aller. « La vie d’aventure était une chose si nouvelle et si excitante pour lui que chaque facette inconnue lui en paraissait désirable. » (p. 41) C’est surtout Mr Crapaud qui crée l’aventure : fou d’automobiles et de bolides, le riche propriétaire est un danger public qui sillonne la région et cause bien des inquiétudes au petit cercle d’amis. Et c’est auprès de Mr Blaireau que Mr Taupe trouve la reconnaissance de ses talents.

Mr Taupe est un ingénu mal dégrossi, mais plein de courage et de bonnes intentions. Mr Rat est plus débrouillard, plus sensé, mais il se pique parfois de poésie et de mélancolie. Le richissime Mr Crapaud est un vantard toqué qui change de lubie dès que le vent tourne, mais il a le cœur sur la main. Mr Blaireau est un solitaire bourru qui n’abandonne jamais ses amis. Au fil des pages, les personnages s’affinent et une certaine noblesse se fait jour dans leurs comportements. En dépit de leurs défauts et de leurs marottes parfois excessives, les quatre amis gardent à l’esprit des valeurs telles que la fraternité et l’honneur. « L’indépendance, c’est bien beau, mais nous autres, animaux, nous ne tolérons pas que les l’un des nôtres dépasse les limites permises quand il se tourne en ridicule. » (p. 101) Le garant de cette noblesse, c’est Mr Blaireau. Il est la voix de la sagesse, une sorte de patriarche à l’autorité incontestée.

Ce roman présente une balance constante entre un ici douillet et rassurant et de glorieux ailleurs trépidants. Ainsi, la rivière et la Forêt sauvage sont des limites rassurantes, mais le vaste monde a parfois une voix de sirène. Vient alors le désir de tout quitter, d’abandonner séance tenante le foyer et de partir sur les routes. Mais l’exaltation retombe bien vite après quelques aventures rocambolesques et l’amour du petit logis reprend toujours ses droits. « Le monde d’en haut exerçait sur lui, l’habitant des souterrains, une trop forte attirance pour qu’il renoncât à retrouver ce vaste théâtre. Mais comme c’était bon d’avoir un coin qui l’attendait, un coin rien qu’à lui, rempli de choses qui seraient toujours heureuses de le revoir et de lui faire bon accueil. » (p. 97)

Kenneth Grahame peint un petit monde enchanté où il est parfaitement normal que les animaux parlent, conduisent des voitures et portent des robes de chambre. L’homme n’est pas absent, mais il est un élément du décor et il remplit des fonctions proprement humaines : juge, policier, geôlier, etc. De fait, les animaux ne travaillent pas, mais loin d’être oisive, leur existence est pleine de menus travaux et d’activités gratifiantes. Selon Kenneth Grahame, il fait bon être un petit animal et retrouver chaque soir sa petite maison. Ce roman est une parenthèse merveilleuse, un tableau magique à partager avec de jeunes lecteurs.

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