Kwei-Lan a été élevée dans le respect des traditions chinoises. Fiancée depuis toujours à un homme qu’elle n’a jamais vu, elle se prépare vertueusement au mariage. Hélas, son futur époux a fait des études de médecine en Occident et il rejette les superstitions et les coutumes ancestrales. Dans les premiers temps du mariage, Kwei-Lan tente de séduire son époux en déployant l’éventail de ses charmes et de ses vertus, dans la pure tradition chinoise, mais c’est peine perdue. « Mon mari ne désire rien de moi. Il n’a besoin de rien que je puisse lui donner. » (p. 60) Se sentant désemparée et inutile, Kwei-Lan décide de s’intéresser à ce qui passionne son époux et de comprendre sa façon de penser. Par amour pour lui et pour lui plaire, elle accepte de débander ses pieds et de s’ouvrir un peu à ce qui vient de l’Occident, même s’il est lui difficile de le concilier avec son éducation orientale. Désormais, Kwei-Lan n’écoute plus la voix de sa mère, mais celle de son époux. « Mon mari est un sage. Il connaît toutes choses, et ne dit que ce qui est vrai. » (p. 96) Son mari la veut son égale, mais elle lui reste dévouée et fait de lui son seigneur, même si elle accepte de laisser derrière elle l’ancestrale soumission des épouses pour leur mari.
Quand enfin, ils ont un enfant, la jeune femme croit son bonheur complet. Mais c’est compter sans le retour de son frère. Lors de ses études à l’étranger, il a rencontré une Américaine et souhaite l’épouser, mais cela va radicalement à l’encontre des volontés de la mère de Kwei-Lan qui ne peut tolérer que son héritier s’unisse à une étrangère. « Serait-il donc permis à mon frère de tuer sa mère ? Il devrait savoir que les manières peu filiales d’Occident lui sont insupportables. C’est honteux qu’il oublie ainsi son devoir ! » (p. 142)
J’avais beaucoup aimé La mère de Pearl Buck : elle y peignait la vie traditionnelle d’une femme chinoise, entre mariage, enfants et soumission aux anciens et aux dieux. Dans Vent d’Est, vent d’Ouest, l’auteure montre l’ouverture de la Chine au monde et la rencontre entre Orient et Occident, le premier étant convaincu d’être supérieur au second. Les deux cultures s’entrechoquent et il ne tient qu’à leurs membres de savoir s’accommoder du changement. « Apprenez des étrangers ce qu’ils ont de bon, et laissez de côté ce qui ne convient pas. » (p. 110) Kwei-Lan s’adresse à quelqu’un qu’elle appelle « sa sœur » : impossible d’en savoir plus sur cette interlocutrice, mais il me semble que la narratrice s’adresse aux lectrices, tant ce qu’elle raconte touche surtout la condition féminine dans le monde entier. J’ai apprécié cette lecture à la fois touchante et pleine d’espoir.