Sistac

Roman de Charlie Galibert.

Dans le grand Ouest américain, Jean Sistac et Goodfellow se poursuivent sans relâche. Le premier est un Toulousain qui a émigré en Amérique avec ses parents attirés par les promesses d’or de la Californie. On sait peu de choses sur le second, si ce n’est qu’il est tenace. « Sistac était un fuyard. Sur ses traces, il y avait un chasseur. Et qui venait pour lui. » (p. 10) Les deux sont chasseurs de primes, mais il ne fait pas bon exercer cette profession avec la nouvelle politique d’élimination qui les concerne. Comme dans un combat de titans, il ne peut en rester qu’un. Mais qui chasse l’autre ? « Peut-être avaient-ils tous deux également besoin d’un témoin de leur vie pour la vivre. Et peut-être aussi que la vie de Sistac ne commençait vraiment qu’avec cet autre : Goodbrother. » (p. 63) Car oui, Sistac renomme sans cesse son poursuivant qui est aussi sa proie : il devient Goodbrother, Badbrother, Goodfilou ou encore Snakebrother. Cette identité sans cesse retouchée confère à l’ennemi une dimension protéiforme presque surnaturelle. « Goodbrother le suivait toujours, comme une ombre décalée. Comme s’il avait été en croupe derrière Sistac. » (p. 106)

Il est question d’Indiens, de la guerre de Sécession, de soldats déserteurs, d’esclaves et de pénurie de munitions. Mais aussi de froid, de fièvre, de faim et de bêtes sauvages. « L’ennui, c’est que jamais un homme ne vit assez longtemps pour voir la couleur de ses rêves. » (p. 70) Dans l’immensité du désert et des espaces sauvages, la perte de repères n’est pas que géographique, elle est aussi mentale. Sistac est désorienté, obsédé par Goodfellow qui est à la fois son alter ego et son frère ennemi. « Fuir devant lui était encore le poursuivre. » (p. 106) La fuite reste la seule échappée possible, mais vers où ? Le Mexique ou le Grand Nord ? Quoi qu’il en soit, le mouvement entraîne le mouvement, maintient en vie et affine les réflexes de survie. « On ne réfléchit jamais aussi bien qu’en fuyant au galop. » (p. 10)

Ce western est un très bon roman d’aventure et de course-poursuite, mais la fin est un peu décevante après la tension accumulée au fil des 110 premières pages. Sans doute faut-il poursuivre cette lecture avec L’autre qui évoque plus précisément la figure de Goodfellow dont l’ombre maudite plane sournoisement sur la marche effrénée de Sistac. « La chasse continuelle que lui donnait Goodfellow ne lui laissait encore d’autre issue que la fuite. » (p. 31) Je garderai toutefois un bon souvenir de ce roman. Et, au cours de ma lecture, je n’ai pas pu m’empêcher de fredonner les premières notes de certaines musiques d’Ennio Morricone. Je vous mets au défi de ne pas entendre des airs d’harmonica en tournant les pages de ce roman !

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