Quatrième de couverture – Pourquoi le poème nouveau que Baudelaire élabore dans les temps nouveaux du capitalisme prend-il la forme de la photographie ? Cela est pourtant à peine concevable puisque le poète n’avait pas de mot assez dur pour cette technique nouvelle dans laquelle il ne reconnaissait pas un art, c’est-à-dire une image issue du langage et du rêve, du pinceau et de la musique, mais de la seule « industrie » et de la matière. Mieux : de quelle manière et pourquoi ce poème se fixe-t-il comme image photographique ? Or, ce n’est pas que le poème s’abandonne, c’est qu’il prend cette forme. Et de son côté, l’image photographique ne cesse, aujourd’hui encore et toujours, de s’extraire en quelque sorte comme ce poème-là. On espère le vérifier grâce à une reformulation des raisons du poème baudelairien afin d’être en mesure, ensuite, de plonger le regard au fond des images photographiques qui les accomplissent dans l’Histoire et notre présent, celles du grand photographe américain Walker Evans (1903-1975), traducteur surprenant et méconnu de la Chambre double de Baudelaire.
Il est assez triste, voire démoralisant de constater que son intellect fond avec les années et le manque de pratique. Quand j’étais en khâgne et ensuite en master, au prix d’un effort certain, j’aurais compris le texte d’André Hirt et, peut-être, j’en aurais tiré de la connaissance et de la matière pour nourrir ma propre réflexion. Aujourd’hui, au plus fort de ma concentration, je parcours les lignes et je saisis quelques points de cette brillante démonstration, mais je doute d’en retenir quoi que ce soit, et encore moins de savoir la réutiliser face à d’autres œuvres. Cela n’enlève rien à la qualité du texte et ne fait que souligner ma propre misère intellectuelle.
« Comprendre Baudelaire, c’est être baudelairien. Et être baudelairien, n’est-ce pas, dans et par « culte des images » regarder au fond de l’inconnu ? Et l’inconnu, n’est-ce pas d’abord l’Histoire, ce que le « nouveau » recouvre ? Le photographe Walker Evans fut, de son propre aveu, baudelairien. Aussi, ses photographies constituent-elles le poème de notre présent. » (p. 17)
Ouvrage lu dans le cadre du Prix « Écrire la photographie » organisé par la librairie lilloise Place Ronde.