Footboys

Roman de Mathieu Tulissi Gabard.

À 15 ans, Mathieu intègre le Montpellier Hérault Sport Club. C’est loin de chez lui, mais quelle chance d’intégrer un centre de formation. Avec ça, c’est certain, il deviendra pro. Il ne s’attendait pas au bizutage, au manque d’encadrement, à la difficulté de la séparation et à l’adolescence volée. « Bienvenue en misère affective, au beau milieu d’un désert de soin psychologique, sur le vaste continent de la souffrance physique. » (p. 35) Mais ces sacrifices et ces chagrins, ce n’est pas pour rien s’il peut jouer, se perfectionner. Hélas, les semaines passent et rien ne s’améliore. Les espoirs sont déçus, le plaisir disparaît, la passion vacille. Il y a certes peu d’appelés dans les centres de formation, mais encore moins d’élus. Quand l’échec se profile à l’horizon, certains choisissent les excès, d’autres trébuchent dans le désespoir. « Pour moi la vie elle comptait pas si y avait pas d’foot. » (p. 7)

Adulte, Mathieu raconte son histoire et il fait parler ses anciens copains du centre. Tous disent les maltraitances de l’institution, l’absence de considération, l’impression d’être remplaçables. Ils avaient un talent certain, mais n’ont pas percé dans le milieu. Il leur reste l’amertume, les regrets, des dépressions longues à guérir et une vie à réaxer à côté du football. « J’avais le ballon comme ami compagnon de confiance, mais il a été utilisé contre moi, violenté, transformé, raffiné, industrialisé, vidé, désenchanté, dangereux, blessant, je ne sais plus qui il est, je dois m’en séparer, le renier, l’abandonner… » (p. 95) Les anciens espoirs du ballon rond et leur entourage font entendre des voix brutes et poignantes, sans retouche, presque sans ponctuation, sans pause. Ce sont des cris de rage longtemps retenus, des cris de douleurs : comment se remet-on d’avoir perdu son rêve de gosse et d’avoir dû ravaler ses cris de victoire anticipés ? « J’veux plus qu’y ait des sportifs comme moi qui souffrent de leur passion. » (p. 30) Ce texte nourri de souffrance est un cri d’alerte : il faut mieux accompagner les jeunes athlètes, les encadrer au-delà du sport et, si ce dernier ne devient pas leur métier, leur aider à dépasser la déception pour continuer à vivre. Le seul reproche que je formule est la confusion des genres : la première page annonce un roman, mais il s’agit plutôt d’un récit émaillé de témoignages. Cela ne change rien à l’histoire, mais modifie sa réception.

Livre lu dans le cadre du Prix Sport Scriptum 2025.

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2 réponses à Footboys

  1. LydiaB dit :

    J’imagine aisément la déception de certains sportifs.

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