La narratrice raconte sa position de maîtresse, au chevet de l’homme qu’elle aime. Elle n’est personne, n’a aucun droit sur ce corps presque mort que tout le monde s’approprie: médecins, infirmières et journalistes. Seule face au drame du « locked-in syndrome », elle dit sa détresse de vivre un amour muet et sans contact. Elle se rappelle leurs souvenirs, leurs étreintes, leurs codes et leur bonheur avant l’accident. Elle refuse de ne voir en lui qu’un malade, qu’un corps branché à des machines. Pour elle, il est d’abord un homme, celui qui l’a aimée, qui a quitté femme et enfants pour la rejoindre. Mais cette grande décision est annulée par l’accident. Elle redevient la clandestine, celle qui se cache, qui n’a pas le droit d’être là, qui doit se contenter de ce qui reste. Entre « vous » et « tu », elle cherche ses mots pour tout dire, pour sauver l’amour malgré l’absence de contact.
J’ai aimé le sujet, mais la narration est parfois un peu pénible. Le passage du vouvoiement au tutoiement dans la même phrase est pénible. Je me suis perdue dans le récit. Certaines phrases sont obscures, juste des évocations qui ne ramènent à rien et ne sont pas plus développées. Néanmoins, je reconnais le tour de force de parler du corps en évitant les lieux communs de la maladie et de la mort. L’auteure sait peser ses mots. Son livre m’a rappelé le très poignant film Le scaphandre et le papillon, de Julian Schnabel avec Mathieu Amalric et Emmanuelle Seignier. Le point de vue change: ce n’est pas le malade qui cherche à sortir de sa coquille de silence et d’immobilité, mais celle qui l’aime et qui le regarde qui tente de le rejoindre au cœur de sa solitude muette.