Premier roman d’Agnès Niedercorn.
Rentrée des classes dans un lycée parisien. Bohémond arrive de Paray-le-Monial et ne connait personne. Passée la première appréhension, il rencontre l’énergique Joséphine, les amoureux Chloé et Mehdi, le secret Noam et, surtout, la belle Silia. Dans la première ES qui les réunit tous, l’année va se passer entre les cours, la préparation des épreuves anticipées du baccalauréat et des échanges de SMS lourds de sens et de conséquences.
À l’ère des nouvelles technologies, les déclarations d’amour s’envoient par texto et les sentiments s’exacerbent au son du bip de réception d’un nouveau message. Quand Chloé entreprend de fouiller dans le portable de Mehdi, on touche un peu aux Liaisons dangereuses, le tout à la sauce code PIN et messagerie instantanée. « Il savait que Chloé pouvait se montrer jalouse, curieuse et suspicieuse. Elle supportait mal de ne pas tout savoir sur lui et de le voir lire ses messages en catimini. » (p. 91) Mais qu’il s’agisse de lettres ou de SMS, un secret n’est pas nécessairement une trahison et la confiance n’est pas conditionnée aux NTIC. Noam, Silia, Joséphine et tous les autres l’apprendront un peu à leurs dépens, mais tout est bien qui finit bien.
Le gouffre semble immense entre la nouvelle génération et l’ancienne : « Papa, fais-moi plaisir, ne cherche pas à comprendre les gens de ma génération. De toute façon, ton cerveau n’est pas formaté pour ça. » (p. 110) Jusque-là, rien que de très normal, c’est un discours classique de jeune à un vieux (con). Mais la génération Y (puisque c’est bien d’elle dont il s’agit) se démarque par l’utilisation et la maîtrise d’un nouveau langage : « Mais c’est rien, c’est juste un p’tit SMS, ça fait partie de notre vie. […] On peut très bien suivre un cours de nos deux oreilles, tout en tapant un SMS du pouce… Franchement, c’est trop simple et y’a pas de quoi s’énerver. Vous savez, on n’est pas comme vous, nous, on est parfaitement bilingues. » (p. 151) Il faut comprendre bilingue en français et en SMS.
L’idée est intéressante, mais à ce point, il m’est apparu que le langage SMS était plus un prétexte qu’un sujet. L’échange de petits papiers sous le bureau aurait eu le même effet puisque les SMS ne sont que le véhicule des histoires amoureuses des lycéens. Alors, oui, nous sommes en 2010 et on consomme du texto à toutes les sauces, mais le roman d’Agnès Niedercorn n’aurait pas moins bien fonctionné avec des signaux de fumée ou des sémaphores. Le principe général, c’est l’échange de messages et les malentendus et les méprises qui en découlent.
Je reproche à ce roman quelques formules maladroites et des blagues potaches et/ou éculées. Les intrigues amoureuses sont cousues de gros fils blancs, façon câble ADSL : peu de mystère sur qui embrassera qui. Mais quelques aspects méritent d’être soulignés : le roman aborde avec pudeur et intelligence la maladie, certaines difficultés familiales et les questions identitaires des adolescents. Pas de guimauve, ni de grandes phrases, le texte reste sobre et peut permettre à de nombreux adolescents de se retrouver dans les portraits – peut-être un brin stéréotypés – des différents personnages.
Je ne garderai pas un souvenir très profond de cette lecture qui s’adresse à une cible plus jeune que moi (enfin, bref…). Cinéma, manga, mode, café, name-dropping, aucun doute que cela doit plaire aux lycéens ou très jeunes étudiants d’aujourd’hui. Idylles, mensonges et compagnie est un premier roman : la plume est là, mais elle gagnera à être taillée plus finement. Toutefois, le texte est sympathique et j’ai souri à plusieurs reprises.
Idylles, mensonges et compagnie a reçu le prix Nouveau Talent de la Fondation Bouygues Telecom-Metro en 2010 : la condition de participation à ce prix littéraire est d’intégrer dans le texte le langage SMS et/ou les messageries instantanées.