Roman d’Émile Zola.
Pour échapper à un tuteur trop pressant, Madeleine Ferrat s’échappe et se donne à un jeune homme. Pendant un an, ils vivent ensemble jusqu’au jour où Jacques part en Cochinchine, laissant Madeleine seule et perdue. « Peu à peu, elle accepta sa position. Son esprit se salissait à son insu, elle s’habituait à la honte. » (p. 64) Elle rencontre alors Guillaume de Viargue, jeune noble à la nature faible, avide de tendresse. Ensemble, ils s’apaisent et s’offrent un réconfort mutuel, finissant même par s’aimer sincèrement. « Il leur suffisait de vivre seuls, face à face, et de se donner le calme de leur présence. » (p. 143) Mariés et parents, ils vivent heureux pendant quatre ans jusqu’au retour de Jacques qui est également l’ami d’enfance de Guillaume. L’irruption du jeune homme brise la félicité dolente des époux et jette en leurs cœurs une épouvante mêlée de culpabilité et de rancœur.
Il n’est pas question de l’atavisme tant développé dans la série des Rougon-Macquart, mais Émile Zola explore ici une autre théorie pseudoscientifique, celle de l’imprégnation voulant qu’une femme reste à jamais marquée par son premier amant et que son premier enfant aura nécessairement les traits de ce dernier. « Lorsque Madeleine s’était oubliée dans les bras de Jacques, sa chair vierge avait pris l’empreinte ineffaçable du jeune homme. […] On eût dit que Jacques, en la serrant sur sa poitrine, la moulait à son image. » (p. 216 & 217) Grosso modo, avec Zola, la femme est une pâte à modeler, une pauvre chose malléable. Charmant, n’est-ce pas ?
Cela dit, si je passe outre l’agacement qu’a causé cette absurde théorie hautement misogyne, j’ai passé un très bon moment avec la plume de cet auteur : il sait comme peu d’autres peindre les sentiments complexes de la nature humaine et parler des tourments de l’âme. Il a écrit un remarquable personnage secondaire en la personne de Geneviève, la domestique protestante qui ne parle que de damnation et de châtiment.