Roman de Stephen King, sous le pseudonyme de Richard Bachman.
Bart Dawes est marié, responsable d’une blanchisserie prospère et propriétaire d’une jolie maison. Mais il est sur le point de tout perdre : l’extension de l’autoroute 784 va passer dans sa rue et le voilà exproprié de son domicile et des locaux de la blanchisserie. Au lieu d’accepter la compensation de la mairie et de trouver une nouvelle maison, Bart rumine contre ce chantier qu’il considère comme une injustice. « Cette saleté d’autoroute ! C’est ça qui a tout foutu en l’air. » (p. 98) Obsédé par les travaux, les démolitions et les engins de chantier, Bart se laisse glisser dans un monde fait de ressentiment et de colère. Dépossédé de ses biens matériels, séparé de son épouse, Bart n’a décidément plus rien à perdre après la mort de son petit garçon. « À quoi bon penser tout le temps à Charlie, Bart ? Cela te détruit. Tu es devenu son prisonnier. » (p. 377) Et qu’y a-t-il de plus dangereux qu’un homme qui n’a plus rien à perdre ?
Dans ce thriller psychologique, le monstre est ce ruban bitumé qui dévore les maisons et les commerces d’une petite ville tranquille. Le monstre est aussi une bureaucratie inepte qui broie les destins individuels au nom de la communauté. « Je me débrouillais, et tout allait plutôt bien, jusqu’à ce que ces types des ponts et chaussées décident d’éventrer ma vie. » (p. 129) Stephen King parle ici du couple, de l’alcoolisme, de l’impuissance de l’individu. Il évoque également la crise de l’énergie, et notamment du pétrole, qui inquiétait la population américaine au moment de l’écriture du livre.
Je n’ai pas été vraiment convaincue par ce roman, principalement parce que je n’ai pas compris qui étaient Fred et George : apparemment, ce sont des voix intérieures qui tourmentent Bart, mais le narrateur utilise ces prénoms pour désigner des personnages qui portent également d’autres noms. Un peu confus, tout ça. Par ailleurs, le personnage de Mary, l’épouse de Bart, me semble mal construit et incohérent. Chantier sent le roman de jeunesse à plein nez et c’est bien à ce titre qu’il faut le considérer pour ne pas trop le déprécier.