À lire après Mr Mercedes et Carnets noirs.
Roman de Stephen King.
Depuis que Brady Hartsfield, alias Mr Mercedes, a été mis hors d’état de nuire par Bill Hodges et ses comparses, il est dans un état végétatif dans une clinique. Mais ce n’est qu’une apparence : Brady a développé de puissantes capacités psychiques qui lui permettent de prendre le contrôle d’autres personnes. Si vous en doutez, c’est bien une manifestation du shining. « Brady ne voulait pas passer en justice. Pas quand il se pouvait qu’il ait encore des choses à faire. » (p. 122) Profondément déçu par son « score » macabre au City Center et frustré de ne pas avoir pu faire sauter un amphithéâtre plein d’adolescents, il met en œuvre une terrifiante machine de mort qui pousse au suicide. Brady est bien réveillé et il est bien décidé à en découdre avec Hodges, et à gagner la partie. « Hodges devait vivre, respirer l’air toxique dans un sac de culpabilité auquel il ne pouvait pas échapper. Jusqu’à ce qu’il craque ou se tue. » (p. 226) Dans sa vengeance à distance, Brady semble avoir oublié que le flic à la retraite n’a jamais cessé de le surveiller. Hélas, Bill est malade et sa ronde prendra bientôt fin.
Comme dans Cellulaire, Stephen King développe une large mise en garde contre les gadgets électroniques et les réseaux, ici le web qui permet à Brady de s’échapper de la chambre 217. « Un petit don de télékinésie n’est rien comparé au pouvoir d’Internet. » (p. 316) S’il faut se méfier des inconnus qui vous offrent des trucs gratuits, il faut encore plus se méfier des jeux anodins. Brady est un antagoniste fascinant, aussi détestable que Bill Hodges est sympathique. « Hodges lui-même s’est découvert incapable de cesser de monter la garde. » (p. 17) Comme il y a une justice, les vilains sont punis par là où ils ont péché. Et dans ce dernier volume de la trilogie Hodges, Stephen King propose un nouveau point de vue sur la tuerie du City Center. L’horreur de ce drame est telle qu’il serait sans doute possible d’écrire une infinité de variations sur le sujet. À nouveau, et parce qu’il connaît bien le sujet, Stephen King développe le thème du corps en souffrance, du corps diminué et supplicié, mais aussi du corps qui se régénère et de l’esprit qui se débarrasse de la contingence corporelle. « Contre vents et marées il a accompli une incroyable odyssée. Ce qu’en seront les ultimes résultats est impossible à prévoir, mais il y aura des résultats, c’est certain. Et ça rongera le vieux flic comme de l’acide. La vengeance est vraiment un plat qui se mange froid. » (p. 260) Au passage, l’auteur se permet un très satisfaisant (de mon point de vue) coup de griffe contre Daesh. Mais surtout, il porte un message important de prévention contre le suicide. Fin de ronde est une excellente conclusion de la trilogie Hodges, très logique et émouvante.