Paulina 1880

Roman de Pierre Jean Jouve.

Paulina Pandolfini est la seule fille d’une riche famille milanaise. À sa beauté stupéfiante s’ajoute une nature passionnée et exaltée. « Pauline jeune fille aimait surtout dans les églises les supplices des Saints. » (p. 29) Son père et ses frères, résolus à préserver l’honneur de la famille, érigent autour d’elle des murs, des portes et des serrures pour s’assurer que personne ne la touchera. « Les Pandolfini se décidèrent à prendre des mesures de surveillance exceptionnelles. […] Cette fille trop belle et surtout trop vivante était leur inquiétude. » (p. 37) Mais vouloir arrêter Paulina, c’est poser un barrage de brindilles devant un fleuve en crue. La belle enfant a 19 ans et se consume pour le comte Michele Cantarini, marié et plus vieux de 20 ans. « L’étroite surveillance des Pandolfini la laissait absolument libre puisque nue devant la lune elle pouvait aller dans ses rêves comme elle voulait. » (p. 45 & 46) Pauline commet l’impensable et trompe la surveillance paternelle pour retrouver son amant.

Pourtant, pieuse jusqu’à l’extase, Pauline se débat avec la notion de faute et de péché, certaine que le mensonge qu’elle fait à son père est pire que l’adultère brûlant auquel elle se livre. En cette âme ardente se mêlent la foi et l’amour charnel. « Elle ne pouvait séparer Dieu principe de toutes choses d’avec son amour lumière intérieure de toutes choses ; la pureté du baiser qu’elle donnait était la pureté de la croyance qu’elle tournait vers Dieu. » (p. 71) Comme le retraceront les journaux de l’époque, Paulina tente le couvent où son amour mystique confine au délire, mais trop sensuelle pour les ordres, elle est rendue à la vie terrestre et à sa passion impossible pour Cantarini. Pauline tue son amant, est jugée et condamnée. La suite n’appartient plus qu’à elle.

Dans ce roman où les chapitres ne sont parfois que des paragraphes, il est impossible de séparer la prose de la poésie. Tout se mêle en un tourbillon sublime, parfois symboliste. Les amours secrètes et malheureuses de Paulina sont dépeintes comme une passion de martyr, une souffrance exaltée et choisie. Ce texte est d’une beauté qui m’a laissée sans voix, si ce n’est pour faire sonner les mots en dehors de ma tête, en les relisant plusieurs fois.

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