
Roman de Wajdi Mouawad.
Wahhch Debch veut voir le visage de l’homme qui a assassiné et violé son épouse. Il ne cherche pas la vengeance, seulement la preuve que ce n’est pas lui qui a tué Léonie. Il traverse le Canada et une partie des États-Unis pour retrouver Welson Wolf Rooney, et peu importe les risques qu’il court à poursuivre ce tueur sans pitié. « Tu vis avec l’idée que si tu pouvais voir le visage de celui qui a tué ta femme, tu pourrais te libérer de la culpabilité de ne pas avoir réussi à la sauver. » (p. 186) Au gré des chapitres, les narrateurs changent, mais conservent un point commun peu banal : ils sont des animaux. Chacun à leur hauteur, ils suivent des yeux Wahhch et son errance, ils voient toutes les couleurs de son chagrin et de sa colère. Ils sont des compagnons domestiques ou de ferme, des bêtes sauvages, des insectes, des vermines et des prédateurs, des oiseaux ou encore des reptiles. C’est tout le règne animal qui prend la parole pour raconter un récit où l’humanité fait faillite. Certains narrateurs prennent la parole plusieurs fois ; tous composent un chœur empathique, une âme multiple qui compatit aux souffrances du veuf. « J’ai su alors que cet homme avait lié il y a longtemps, et d’une manière par lui seul connue, son destin à celui des bêtes. » (p. 53) Les animaux se font les témoins de la violence qui n’en finit pas. Ils sont les totems de la quête de sens de Wahhch, pour accepter le présent et comprendre le passé.
Ce roman brasse des sujets forts, mais je ne suis pas convaincue par le tissage qui les relie. Il y a la question indienne en Amérique du Nord, les conflits armés au Proche Orient, les secrets familiaux délétères et les colonialismes de toute sorte. Tout cela est intense et aurait mérité des textes séparés. Trop de drames pèsent sur le personnage de Wahhch : veuf d’une femme massacrée, enfant déraciné, enterré vivant… Tout cela compose une fresque macabre improbable, sauf à dire que la violence est omniprésente, inévitable et qu’elle ne relâche jamais ses proies. Je retiens cependant de ce roman une langue lyrique et envoûtante. « Perdu éperdu dans l’instant de ses pas, dans le claquement des talons contre la surface gelée de la route, il était dans son manteau comme, dans le ciel, serait le drapeau de la profonde nuit. Au milieu des maisons, il allait dans sa nuit et sa nuit allait dans la nuit. » (p. 65)
Je n’accroche pas du tout à son écriture. Mes collègues se moquent gentiment de moi avec ça car elles, elles l’adorent.
J’avoue que je ne suis pas certaine de lire autre chose de cet auteur. J’ai trouvé l’écriture magnifique, mais c’est extrêmement violent.
Comme dans « Incendies ».
OK, je passe mon tour !!!
🤣