May le monde

Roman de Michel Jeury.

Quatrième de couverture – May a dix ans. Peut-être est-elle en train de mourir. Le Dr Goldberg l’a envoyée en vacances dans la maison ronde, au milieu de la forêt, rejoindre quatre locataires, Thomas et Lola, Nora et la docteure Anne. Ils sont chargés en fait de distraire les enfants malades. Et de leur apprendre le monde. Un monde qui ressemble au nôtre. Mais qui n’est pas le nôtre, qui en est prodigieusement distinct et distant, sur une autre « brane ». Où tout, en réalité, est différent, subtilement ou violemment. Le Dr Goldberg vous expliquera ça. Encore heureux qu’il y ait le changement, sans lequel la vie ne vaudrait pas d’être vécue. La langue de ce roman est étrange. Ce n’est pas tout à fait la nôtre. C’est celle d’un autre univers, parallèle si l’on veut, autorisé par la théorie des cordes, et où les personnages ont la faculté de passer d’un monde à l’autre, voire peut-être de créer des mondes, la faculté de changer. May le monde est peut-être le monde que la petite May mourante est en train de se créer pour y vivre (qui sait ?) à jamais.  Peu de romans de science-fiction sont aussi bouleversants. Aucun n’a jamais été aussi loin dans l’originalité en s’attaquant aux règles mêmes du langage sans jamais sombrer dans l’inintelligibilité ou l’obscurité.

J’ai lu ce roman pour la première fois en 2010. À l’époque, je n’avais pas compris grand-chose et je pensais encore que je n’aimais pas la science-fiction. En 12 ans, j’ai eu le temps de revenir sur cette certitude bien mal fondée. J’apprécie vraiment la SF, désormais, et je voulais retenter ce roman étrange et insaisissable. Insaisissable, il le reste, mais je considère maintenant cela comme une qualité : ça donne aux lecteurs le champ libre pour tisser des liens entre tous les univers où évoluent les personnages. « Tu seras une infinigie de mondes […]. Et une infiniade de mondes contient chacun de nous. Et chacun de nous contient une infinitude de mondes. » (p. 13) Comme lors de ma première lecture, j’ai été séduite par la plasticité de la langue pratiquée par l’auteur : les mots dérivent d’autres langages, sont proches de mots que l’on connaît et à peine un peu différents pour susciter l’étonnement. C’est un jeu fascinant autour et pour l’écriture. Enfin, cette fois encore, j’ai apprécié le discours écologique qui sous-tend le texte. La jeune May déplore une Terre malmenée par l’homme et rêve d’un monde plus doux et plus respectueux de la nature, avec l’humain en nombre raisonné et contrôlé.

Bref, 12 ans après ma découverte de ce texte, je l’ai bien plus apprécié. « Encore heureux qu’il y ait le changement, sans lequel la vie ne vaudrait pas d’être vécue. » (p. 14)

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