Une expédition française en Antarctique découvre les ruines d’une civilisation enfouie sous mille mètres de glace et de terre. D’après les mesures, les vestiges attendent depuis 900 000 ans, et ils émettent un signal. « Ça dépassait l’histoire et la préhistoire, ça démolissait tous les crédos scientifiques, ce n’était plus à l’échelle de ce que ces hommes savaient. » (p.26) Grâce à une mobilisation internationale, une construction étonnante est mise au jour : un gigantesque œuf en or qui abrite un homme et une femme endormis depuis des millénaires. Les deux êtres sont d’une beauté presque parfaite et sont entourés d’objets qui attestent d’une technologie largement supérieure à celle que les explorateurs connaissent. Hélas, la décision de réveiller le couple ne sera pas sans entraîner de terribles conséquences. Chaque pays voudrait s’approprier les merveilles promises par cette civilisation perdue. « Devant l’énormité de l’enjeu, personne, bien que ne doutant de personne, ne sait faire confiance à personne – même pas à soi. » (p. 168) Mais le plus grand drame naîtra d’une douleur d’amour restée vivace pendant près d’un million d’années.
Achevé en 1968, ce roman n’est pas daté et la SF reste tout à fait convaincante, voire parfaitement pertinente dans ses mises en garde. Elle s’accompagne d’un pessimisme assez fort à l’encontre de l’évolution et du progrès. « Il ne faut pas trop demander à un cerveau automatique. » (p. 82) En opposant les pays imaginaires du Gondawa et d’Enisoraï, René Barjavel fustige évidemment la Guerre froide et dénonce l’ineptie de la course à l’armement qui débouche inévitablement sur des conflits. Il prône également le respect de toute vie, animale et végétale, dans une démarche antispéciste poussée à l’extrême et qui ne manque pas de me convaincre. L’auteur célèbre surtout l’amour absolu, supérieur à tout, même au temps.
J’ai découvert ce roman quand j’avais 10 ou 11 ans. De là était née ma grande admiration pour René Barjavel : en quelques années, j’ai tout lu de lui. Ma relecture n’a pas amoindri mon souvenir, et c’est heureux. René Barjavel est incontestablement un incontournable et un pilier de la science-fiction française. Je pense continuer à redécouvrir ses romans.